Un accompagnement pluriel et fédérateur du secteur musical, entretien avec Ludovica Marsili

En 2025, seize ensembles reçoivent le soutien de la Caisse des Dépôts. Comment choisissez-vous les bénéficiaires ?

Ludovica Marsili : Cela fait maintenant dix ans que la Caisse des Dépôts, mécène historique de la musique en France, a mis en place l’appel à projets « jeunes ensembles », qui a permis de soutenir au total près de soixante formations, qui défendent une grande diversité de répertoires, de la musique ancienne à la musique contemporaine. Tout ensemble professionnel d’au moins cinq musiciens et de moins de dix ans d’existence peut se porter candidat. Un comité de sélection se prononce ensuite sur la base du projet artistique mais aussi sur le potentiel de développement et de diffusion de l’ensemble ; nous sommes ainsi attentifs à la rigueur du budget, à la qualité de la gouvernance et à la solidité des partenariats. Surtout, notre action s’inscrit dans le cadre des missions d’intérêt général de la Caisse des Dépôts. Pour nous, la musique – et, plus largement, la culture – sont des vecteurs importants de cohésion sociale et territoriale.

« Pour nous, la musique – et, plus largement, la culture – sont des vecteurs importants de cohésion sociale et territoriale. »

En quoi consiste l’aide aux ensembles ?

L.M. : Il y a évidemment une dimension financière, qui a pour but d’aider nos lauréats à se structurer pour mieux porter leurs projets artistiques et s’autoriser une certaine prise de risque. Par exemple, Simon-Pierre Bestion, directeur artistique de la compagnie La Tempête, dit que cela lui a permis de « rêver ». Cela passe par un soutien dans la durée à la structure dans sa globalité, et pas seulement pour un projet spécifique. Nous voulons les aider à trouver leur place sur la scène musicale nationale voire internationale. Cela dépasse la seule aide financière : nous proposons aux ensembles un suivi régulier, avec des formations sur des questions transverses (le développement à l’international, la transformation écologique du secteur…) et, plus généralement, nous avons à cœur de créer des espaces de rencontre, d’interconnaissance. Nous sommes un mécène « incubateur ». C’est vraiment tout cela qui fait grandir un ensemble et le succès rencontré par les ensembles Correspondances ou Il Caravaggio, que nous avons soutenus dès leurs débuts, sont un encouragement à poursuivre et développer notre action.

Au-delà des ensembles, vous soutenez également d’autres projets d’insertion professionnelle et de transmission.

L.M. : Un deuxième axe de notre mécénat concerne les dispositifs de professionnalisation : des lieux comme l’Abbaye aux Dames, Ambronay, Royaumont ou l’Académie Ravel de Saint-Jean-de-Luz, des concours tels ceux de Besançon (direction d’orchestre), Bordeaux (quatuors à cordes) ou le Concours Voix des Outre-mer favorisent le repérage, l’insertion professionnelle. Là encore, notre soutien se déploie à l’échelle de tout le territoire : quatorze des vingt projets lauréats en 2025 sont situés en région. Enfin, le dernier axe de notre mécénat est le soutien à des projets de pratique musicale pour le jeune public. Mener ce type de projets, c’est un métier et ce sont des actions de long terme, comme celles que mènent Les Talens Lyriques dans les écoles ou la Maîtrise citoyenne itinérante de l’Opéra de Nancy.

Comment accompagnez-vous les évolutions du secteur ?

L.M. : Nous sommes très attentifs aux évolutions, qu’elles soient conjoncturelles ou structurelles, pour adapter nos soutiens et en amplifier l’impact. Dès cet automne, nous ouvrons la possibilité de continuer à accompagner nos ensembles alumni quelques années après notre soutien initial. Nous allons également leur destiner un prix d’excellence, le Prix Caisse des Dépôts pour la Musique. Enfin, nous avons lancé « Legato », un programme visant à accompagner la diffusion de la musique contemporaine, en partenariat avec l’Office national de diffusion artistique et la Maison de la Musique Contemporaine, dont l’ambition est de susciter l’intérêt des scènes pluridisciplinaires pour ces esthétiques et d’en élargir le public.

Propos recueillis par Jean-Guillaume Lebrun