Peter Laul & Graf Mourja
La saison musicale du Théâtre de la Ville [...]
Événement attendu : la création mondiale de Michael Jarrell, avec Bo Skovhus et Barbara Hannigan dans les rôles de Titus et Bérénice.
Les héroïnes antiques inspirent décidément le compositeur Michael Jarrell. Après Cassandre, « monodrame pour comédienne » créé en 1994 au Théâtre du Châtelet, et repris l’an dernier à l’Athénée avec Fanny Ardant, c’est au tour de Bérénice d’être le sujet principal de sa nouvelle œuvre lyrique. S’emparant de la tragédie de Racine, le musicien suisse, né en 1958, revisite la relation entre Bérénice, la princesse de Palestine, et Titus, l’empereur de Rome. Symbole de l’amour impossible, paroxysme du conflit entre passion et raison (d’État), l’histoire malheureuse entre les deux protagonistes a traversé les siècles grâce aux paroles célèbres de Suétone – dont s’est inspiré Racine : « Berenicen statim ab urbe dimisit invitus invitam » (« Quant à Bérénice, il la renvoya aussitôt de Rome, malgré lui, malgré elle »).
Un livret en alexandrins
Pour cette commande de l’Opéra de Paris, Stéphane Lissner a souhaité un livret en français. Michael Jarrell ne fait pas mystère de son « rapport complexe et problématique au français chanté à l’opéra » (son Cassandre est d’ailleurs un rôle parlé), mais il a précisément choisi un texte en alexandrins « pour la distance qui existe entre ce français-là et le français d’aujourd’hui ». C’est donc dans le vers éminemment musical de Racine que se nouent les quatre séquences du livret écrit par Michael Jarrell lui-même : la décision de Titus de sacrifier son amour pour Bérénice, l’annonce qui lui en est faite, le désespoir de la reine, ses adieux. Le compositeur livre ainsi sa vision des héros : « Il existe une tradition qui fait de Bérénice une femme aimante, la seule qui puisse aimer d’un amour pur et qui se retrouverait trahie par le goût du pouvoir de Titus. Or, quand on commence à s’intéresser au sujet, on se rend compte que c’est beaucoup plus complexe que cela et que Titus se retrouve prisonnier de ce jeu de pouvoir. Sa relation avec Bérénice change au moment où son père meurt. Il doit devenir empereur. Officiellement, il n’aura plus d’histoires sentimentales, il ne fera plus la guerre et il fera plusieurs réformes importantes pour la société romaine. » Pour donner vie à la princesse juive et à l’empereur romain, il faudra compter sur le baryton Bo Skovhus et la soprano Barbara Hannigan, dirigés par Philippe Jordan. Quant à la mise en scène, elle sera signée Claus Guth, qui revient à l’Opéra de Paris après sa proposition très remarquée de La Bohème.
Isabelle Stibbe
Tél : 08 92 90 90. Places : 10 à 160 euros. Durée : 1h30 sans entracte.
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