William Christie
Aux sources de l’opéra baroque
L’événement lyrique baroque de la rentrée revient incontestablement à William Christie qui nous présente une nouvelle production du drame sacré Il Sant’Alessio de Stefano Landi (1587-1639), contemporain de Monteverdi et inventeur, dans les pas du maître de Mantoue, de ce qui allait bientôt devenir l’opéra. Après avoir donné l’œuvre en concert en 1995 et l’avoir enregistré pour Warner (qui la réédite aujourd’hui), le patron des Arts Florissant rêvait de lui redonner vie dans une version mise en scène. Son vœu se réalise aujourd’hui avec la complicité de Benjamin Lazar – jeune metteur en scène spécialiste du monde baroque – et d’une distribution vocale entièrement masculine dominée par Philippe Jaroussky dans le rôle-titre.
Une puissance dramatique inédite
Avec le recul, Landi reste à mes yeux l’une des figures majeures de l’école romaine de son temps. Musicalement, Il Sant’Alessio est un vrai prodige d’écriture. Les sinfonias orchestrales qui ouvrent chaque acte forment les tout premiers exemples d’ouverture d’opéra; les ensembles chorals sont d’une puissance dramatique inédite et suscitent de saisissants effets de contraste face au style récitatif, dont toute l’œuvre est nourrie. On l’entend à chaque instant, la souplesse et le lyrisme des lignes mélodiques sont de la main de quelqu’un pour qui le chant n’a pas de secret, ce qui n’a rien d’étonnant quand on se rappelle que Landi avait pu entrer en qualité d’alto dans le chœur pontifical. Il y a dans l’écriture de notre Romain quelque chose d’à la fois simple, vivant et bouleversant : un souffle qui habite l’œuvre d’un bout à l’autre, prouvant que cet opéra était destiné à une occasion importante (il honore la visite du roi Alexandre de Pologne dans la Ville Éternelle), et révélant la puissante ferveur religieuse de Landi ».