Enchantements orchestraux avec l’Orchestre Atelier Ostinato dirigé par Raphaël Merlin
Raphaël Merlin dirige l'Orchestre Atelier [...]
Avec The Rake’s progress de Stravinski, Mathieu Bauer fait ses débuts à l’opéra avec une mise en scène habile et inventive, secondée par une lecture musicale magistrale.
Jouant avec les codes de la fable morale du Siècle des Lumières à partir de peintures de Hogarth, The Rake’s progress est aussi – et surtout – une parabole sur les promesses et les déceptions de l’individualisme de la société de consommation, qui se consolide au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. Exilé à Hollywood, Stravinski était aux premières loges. Mathieu Bauer, le directeur du CDN de Montreuil, l’a parfaitement compris, et inscrit les péripéties du livret d’Auden et Kallman dans un dispositif modulaire – dessiné par Chantal de la Coste – composé de six capsules aux allures d’écran de télévision, qui font également penser à certaines architectures modernistes de l’époque. Les vidéos de Florent Fouquet projetées à la manière cathodique mêlent les procédés – sépia, ombres, etc. – pour décliner, non sans facétie, les désirs et illusions de Tom Rakewell.
Orchestre vitaminé et finesse d’Elsa Benoît
Sans oublier les ambivalences mélancoliques, l’ensemble ne manque pas de rythme, de vitalité dans le jeu d’acteurs et de trouvailles, à l’exemple de la vente aux enchères à la lampe de poche, comme une chose aussi honteuse que la banqueroute. D’autres cèdent un peu à la facilité, telle l’intervention des chœurs dans la salle pour le mariage de Baba la Turque, ou demanderont quelques menus réglages, comme l’enchaînement avec l’épilogue. Cet élan vitaminé est porté par la direction alerte de Grant Llewellyn, à la tête de son Orchestre national de Bretagne, aux sonorités et aux attaques à la précision savoureuse, dans le droit fil de la lettre comme de l’esprit de Stravinski. Dans une distribution de belle tenue se distinguent le lyrisme délicat et la musicalité accomplie d’Elsa Benoît en Anne Trulove. Julien Behr condense la veulerie de Tom Rakewell, face à l’autorité émérite du père Trulove par Scott Wilde, à un Nick Shadow moins noir que de coutume avec Thomas Tatzl, ou encore à l’avidité mordante du Sellem de Christopher Lemmings.
Gilles Charlassier
À 20 heures, le samedi à 18 heures. Durée : 2h40. Tél : 02 23 62 28 28. Places de 5 à 60 euros.
Reprise à Nantes Théâtre Graslin, 1 place Graslin, 44000 NANTES. Du 22 au 30 mars 2022, à 20 heures, le samedi à 18 heures. Tél : 02 40 69 77 18. Places de 4 à 65 euros.
Raphaël Merlin dirige l'Orchestre Atelier [...]