Théâtre - Critique

Un Monde meilleur, épilogue de Benoît Lambert

Un Monde meilleur, épilogue de Benoît Lambert - Critique sortie Théâtre DIJON THEATRE DIJON BOURGOGNE


texte et mes Benoît Lambert

Dans son essai Le Mal qui vient*, le philosophe Pierre-Henri Castel établit (tout à fait sérieusement) l’idée d’une fin prochaine et inéluctable, non pas du monde, mais de notre espèce. Happé par la perspective dérangeante de notre extinction, Benoît Lambert a écrit un monologue théâtral qui, partant de cette catastrophe annoncée, nous amène à reconsidérer l’histoire du genre humain et de ses ancêtres. Il nous pose, pour ce faire, un certain nombre de questions, auxquelles il répond lui-même avec beaucoup de malice, en empruntant les chemins de l’ironie et du raisonnement par l’absurde. Ces réflexions brillantes et décalées sur ce que nous sommes, ce que nous avons été, ce à quoi nous sommes destinés, individuellement et collectivement, vient clore le feuilleton dramatique (intitulé Pour ou contre un monde meilleur) que l’actuel directeur du Théâtre Dijon Bourgogne a initié en 1999 avec Prolégomènes à toute entreprise future qui voudra se présenter comme révolutionnaire. Cet épilogue, porté par le formidable Christophe Brault, nous fait remonter l’échelle du temps. Il formule, au passage, quelques-uns de nos impensés et bouscule pas mal de nos certitudes.

Le trou noir de nos origines

 Le comédien surgit du lointain. L’être improbable et joyeusement irréaliste auquel il donne corps fait figure de conférencier. Un conférencier insolite : aigu, vivant, cocasse. Drôle mais pas que. Affuté. Biscornu et paradoxal. Finalement, profondément humain. Un clown plus qu’un personnage, à distance des connaissances – et des hypothèses – qu’il soumet à nos esprits. Il nous regarde les yeux dans les yeux. Un sourire aux lèvres. De sa bouche, sortent des éclats de rire en cascades, voire des débuts de sanglots. A l’aide de sept bouteilles d’eau en plastique, qu’il dispose en ligne sur le plateau, ce semblable nous transporte vers le trou noir de nos origines, il y a quelque sept millions d’années, au temps des premiers hominidés. Il nous fait voyager jusqu’à la naissance de l’homme moderne, trois cent mille ans avant notre ère. Ou jusqu’à l’invention de l’écriture, qui mit fin à la préhistoire, il y a six mille ans. Il s’arrête également sur la révolution néolithique, six mille ans avant cela, qui vit nos congénères chasseurs-cueilleurs se sédentariser. C’est là que nos ennuis commencèrent, affirme facétieusement Christophe Brault, qui balaie une fois de plus nos a priori. Toujours de manière rigoureuse et étincelante. Sans nous appeler à une quelconque forme de sursaut. Car, après tout, il n’est pas là pour nous faire la morale. Encore moins pour nous sauver.

 

Manuel Piolat Soleymat

 

* Ouvrage publié aux Editions du Cerf, en 2018.

A propos de l'événement


Un Monde meilleur, épilogue
du mardi 6 octobre 2020 au samedi 17 octobre 2020
THEATRE DIJON BOURGOGNE
30 rue d’Ahuy, 21000 Dijon.

Du mardi au jeudi à 20h, le vendredi à 18h30, le samedi à 17h. Durée de la représentation : 1h20. Tél. : 03 80 30 12 12. www.tdb-cdn.com


Egalement du 9 au 11 mars 2021 au Théâtre de la Coupe d’Or - Scène conventionnée de Rochefort.


A lire aussi sur La Terrasse

  • Jazz / Musiques - Agenda

« Fragments », nouvel album d’Yves Rousseau en septet avec Géraldine Laurent au saxophone alto.

Le contrebassiste et compositeur signe un [...]

Le vendredi 23 octobre 2020
  • Théâtre - Critique

Le Iench d’Eva Doumbia

Dans Le Iench, Eva Doumbia dénonce les [...]

Du mardi 3 novembre 2020 au 6 novembre 2020
  • Théâtre - Critique

Nous, dans le désordre d’Estelle Savasta

A l’instar du scribe Bartleby, le jeune [...]

Du vendredi 16 octobre 2020 au 18 octobre 2020