Théâtre - Critique

Tout commence toujours par une histoire d’amour (soliloque autour d’une disparition) de Pauline Ribat

Tout commence toujours par une histoire d’amour (soliloque autour d’une disparition) de Pauline Ribat - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de Belleville


Théâtre de Belleville

Tout commence toujours par une histoire d’amour. Mais on le comprend au titre, cela pourrait bien ne pas durer. Dans  ce spectacle qu’elle a écrit, mis en scène et qu’elle interprète, Pauline Ribat raconte l’histoire familiale de Mademoiselle R., dont les parents se séparent lorsqu’elle a 7 ans. Elle a retrouvé les manuscrits dans une malle, paraît-il, comme on le prétendait du temps des monarques et de la censure. Un dispositif narratif qui nous énonce d’emblée que le réel n’est pas loin. D’ailleurs, dans ce spectacle, l’autofiction affleure partout, tout juste troublée par de nombreux jeux de dédoublements entre l’autrice, l’actrice et le personnage qui nous empêchent facétieusement de verser dans la pure lecture autobiographique. Surtout que la comédienne est enceinte.  Une voix off l’annonce dès le début. La  saga familiale à la fois banale et universelle prend avec ce ventre arrondi une nouvelle dimension. Au moment de donner la vie, de fonder une famille, c’est toujours mieux, autant que faire se peut, d’avoir réglé ses comptes avec ses propres parents.

Elle résout l’Œdipe en tuant le Père Noël

Elle, Mademoiselle R., voulait devenir patineuse. Puis actrice. Suivie de près par deux sœurs jumelles, elle est vite descendue de son piédestal d’enfant unique. Puis ses parents se sont séparés et petit à petit son père, ce bel homme « aux yeux bleu turquin », « qui m’a mise au monde », a disparu de la circulation. En peu de mots,  l’histoire de Mademoiselle R ressemble à bien d’autres. Un couple qui se sépare et le père qui largue les amarres. Et les enfants. Pauline Ribat la met en musique avec habileté, dans un rapport de proximité avec les spectateurs, alternant autodérision et épisodes touchants, mise à distance et exploration des douleurs intimes. Quelques leitmotivs irriguent l’histoire. Les yeux bleu turquin, la maison aux volets rouges, le chiffre 7 ou encore bébé riquiqui et bébé plumeau. Au plateau, petit à petit, la scénographie se dépouille, comme  pour laisser place à l’émotion nue. Pauline Ribat, cheveux noirs, voix grave, en leggins clairs, alterne les registres de jeu – humour, voix blanche, joie, colère… -, dialogue avec les spectateurs, énonce le texte jusque dans ses didascalies, et s’adresse finalement à sa mère. Elle résout l’œdipe en tuant le  Père Noël. « Les histoires d’amour finissent mal en général », chantaient les Rita Mitsouko. Mais elles  donnent aussi naissance à de jolis bébés.

Eric Demey

A propos de l'événement


Tout commence toujours par une histoire d’amour (soliloque sur une disparition)
du mercredi 6 avril 2022 au jeudi 30 juin 2022
Théâtre de Belleville
16 Passage Piver, 75011 Paris

du mercredi au samedi à 19h, le  dimanche à 15h. Relâche les 11 et 12 mai. Tel : 01 48 06 72 34. Spectacle vu à la Scène Nationale de Chambéry. Durée : 1h10.


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