Théâtre - Critique

Soleil blanc

Soleil blanc - Critique sortie Théâtre Paris Les Abbesses / Théâtre de la Ville


Théâtre des Abbesses / d’après une fable de Joël Jouanneau / mes Julie Berès

Julie Berès commence par mettre les spectateurs dans sa poche : avec la projection d’une vidéo où des enfants expriment leur vision de la nature, s’en emparent en construisant un radeau ou en tuant maladroitement une sardine, les sourires se dessinent devant tant de mignonnitude, de drôlerie et de poésie. Cette séquence documentaire d’une dizaine de minutes constitue un vestibule pour entrer de plain-pied dans un onirisme qui ne quittera plus la scène. S’inspirant d’un conte inédit de Joël Jouanneau, L’Île interdite, Julie Berès propose un conte mythologique livré par fragments : naissance d’un enfant sous un manteau de neige, adoption par une louve bientôt tuée par un chasseur, éducation par un homme, découverte de l’amour… Sous la fable de l’enfant sauvage, qui interroge notre rapport à la nature, s’esquisse notre part d’humanité. Alors que le spectacle ambitionne de « déplacer notre regard sur le devenir de la planète », on pouvait craindre un discours trop didactique, alarmiste ou manichéen, notamment avec l’épilogue qui nous ramène à notre société contemporaine via les déclarations de scientifiques, de journalistes ou de chercheurs.

La poésie évite l’écueil du didactisme

La forme du conte, sa poésie, ses clins d’œil littéraires comme le visage mutilé de l’enfant évoquant L’homme qui rit de Victor Hugo ou l’abécédaire inspiré de Voyelles de Rimbaud, permettent d’échapper à cet écueil. On en vient même parfois – c’est le seul bémol du spectacle – à perdre de vue le sens tant la splendeur formelle prend le pas. Car c’est elle qui s’impose et reste dans la mémoire bien après la représentation. Tout y participe : l’entremêlement ultra-maîtrisé du théâtre, de la musique, de la vidéo, des costumes et des lumières. Cette écriture de plateau pluridisciplinaire, qui se nourrit aussi du documentaire, semble désormais la marque de fabrique de Julie Berès après Notre besoin de consolation et Désobéir. Même si la technologie et notamment les dispositifs en direct sont à la mode sur les plateaux de théâtre, ils ne sont ici jamais gratuits. L’inventivité des procédés comme la marche de l’enfant en pleine tempête de neige, réalisée à vue par les comédiens à l’aide d’une caméra et d’une figurine en plastique, et projetée en live sur un grand écran, ne cache jamais tout à fait les moyens mis en œuvre pour y arriver. Une façon de ne pas oublier qu’il s’agit de faire semblant. Ce que font si bien les enfants.

 

Isabelle Stibbe

A propos de l'événement


Soleil blanc
du jeudi 22 novembre 2018 au samedi 1 décembre 2018
Les Abbesses / Théâtre de la Ville
31, Rue des Abbesses 75018 Paris

du 22 novembre au 1er décembre à 20H00 et à 16H00. Rens 0142742277.Spectacle vu au Théâtre Romain Rolland, à Villejuif.


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