Théâtre - Critique

Mademoiselle Julie

Mademoiselle Julie - Critique sortie Théâtre Paris Sortie en salle


Cinéma / D’après August Strindberg / scénario et réalisation Liv Ullmann

Elle dit être habitée par la pièce d’August Strindberg depuis toujours. Aussi, lorsque des producteurs sont venus à elle afin de réfléchir à un film sur le thème de la femme fatale, Liv Ullmann a immédiatement pensé à une nouvelle version cinématographique de Mademoiselle Julie. Et l’idée a fait mouche. Après August Falck, Felix Basch, Alf Sjöberg, Mike Figgis…, l’égérie d’Ingmar Bergman s’est donc lancée dans l’adaptation de ce monument de la littérature dramatique suédoise, écrit en 1888. Une adaptation en langue anglaise, qui transpose la pièce en Irlande, mais reste fidèle à l’époque et l’intrigue de la pièce de Strindberg : une jeune aristocrate, restée seule le soir de la Saint Jean avec la cuisinière et le valet de son père, tous deux fiancés, provoque et séduit le domestique sous les yeux de sa promise. « Dès que j’ai commencé à travailler, confie Liv Ullmann, je me suis régalée, non seulement [de] ce que Strindberg avait écrit, mais aussi des motifs qui m’importaient personnellement : être vue ou demeurer invisible, donner une image de soi qui ne correspond pas à ce que l’on est vraiment, être aimé pour soi-même et non pour ce que les autres voient en vous, les rapports de sexe, les crises qui en découlent… »

Les déflagrations de l’intime

Après une première impression de classicisme bon teint, cette Mademoiselle Julie surprend par une façon de tracer des lignes de tensions extrêmement vives, extrêmement complexes entre les êtres. Et parfois très troublantes. Ainsi, pas de traitements psychologiques rebattus dans cette œuvre aux beautés picturales et musicales, œuvre qui nous entraîne dans les errances de l’âme humaine et la tyrannie des enfermements sociaux. Pas de développements linéaires, mais des zones de dépressurisation, des maelstroms d’impulsions et d’attitudes obscures, contradictoires, qui passent par des phases d’apaisement avant de repartir dans de nouvelles éruptions. Coupant les trois protagonistes du reste du monde (Julie – Jessica Chastain ; John – Colin Farrell ; Kathleen – Samantha Morton), Liv Ullmann nous plonge dans un huis clos radical au sein duquel isolement, désespoir et dérèglements intimes ne cessent de tourbillonner. Il y a quelque chose d’une symphonie tragique dans cette Mademoiselle Julie liant grâce et austérité. Une symphonie à laquelle trois grands interprètes apportent souffle, brio, densité. Après Infidèle, en 2000, Liv Ullmann signe un film envoûtant. Au cœur des questionnements de l’être. Et des déflagrations de l’intime.

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement


Mademoiselle Julie
du mercredi 10 septembre 2014 au vendredi 31 octobre 2014
Sortie en salle

Durée : 2h13


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