Théâtre - Critique

L’Importance d’être sérieux

L’Importance d’être sérieux - Critique sortie Théâtre Boulogne-Billancourt TOP


Théâtre de l’Ouest Parisien / de Oscar Wilde / traduction Jean-Marie Besset / mes Gilbert Désveaux

Gilbert Désveaux signe L’Importance d’être sérieux d’Oscar Wilde dans la nouvelle adaptation de Jean-Marie Besset, auteur et directeur du Théâtre des 13 Vents à Montpellier. Peu après la première de la pièce, Wilde est arrêté, en plein succès, avant que ne s’ouvre son procès le 26 avril 1895, qui le condamne pour outrage aux mœurs. Pièce légère et pétillante dont les dandys avancent masqués, L’Importance d’être sérieux ne pose pas d’emblée la question homosexuelle. La comédie brillante défendrait plutôt une philosophie du plaisir – l’important étant de paraître sérieux et non de l’être, pour accéder au pragmatisme d’un mariage bourgeois. Bridée par ses préjugés et un esprit de caste, la bonne société victorienne empêche les jeunes gens de vivre, par respect dû aux traditions, à la famille, à la religion… L’écriture, dont les échanges ciselés et ornés d’épigrammes tournoient à l’infini, de l’ambiguïté à l’écart jusqu’au paradoxe, joue sur la réversibilité des mots et des situations dans des lieux symboliques codés. La ville ou la campagne, le salon ou la serre, le club ou le presbytère, le bon ou le mauvais côté de Belgrave Square, les garçonnières de l’Albany : chacun a sa place.

Les hommes s’en sortent beaucoup mieux que les belles au bois dormant

Le magnanime Jack (Mathieu Bisson) dit à l’élégant Algernon (Arnaud Denis) : « Tu manques trop d’esprit de sérieux… On doit se comporter avec une grande rigueur morale. Parfaitement ! Et comme la grande rigueur morale est incompatible, comme tu imagines, et avec la santé et avec la joie de vivre, afin de continuer mes petites virées à Londres, je me suis inventé un jeune frère … »  Entre, d’un côté, les intentions de principe, les discours moralisants, et de l’autre, les pratiques roturières inavouées de l’hypocrisie sociale, les hommes s’en sortent beaucoup mieux que les belles au bois dormant. Ils servent une conception du bonheur dont ils usent avec gourmandise dans le seul temps présent. Les femmes moins expressives n’imaginent pas l’idée de liberté. Garante des privilèges de sa lignée, la digne Lady Bracknell, qui saura, croit-elle, bien marier sa fille, ne révère que les convenances ; elle inflige à ses proches contrariétés et interdits. Claude Aufaure incarne cette figure aînée castratrice et comique, et s’en donne à cœur joie. Les aimables jeunes filles, Cecily (Mathilde Bisson) et Gwendolen (Marilyne Fontaine), aimeraient prétendre à un choix personnel dans la conduite de leurs amours, différentes de la gouvernante (Margaret Zenou), une vieille fille ridicule. La pièce, apparemment désuète, révèle des maux persistants avec une profondeur savoureuse et amusée.

Véronique Hotte

A propos de l'événement


L’Importance d’être sérieux
du mercredi 30 janvier 2013 au mardi 5 février 2013
TOP
1 place Bernard Palissy 92100 –Boulogne-Billancourt
Du 30 janvier au 5 février 2013, du mardi au samedi à 20h30, dimanche à 16h. Tél : 01 46 03 60 44. Spectacle vu au Théâtre des 13 Vents, CDN Languedoc-Roussillon Montpellier.

A lire aussi sur La Terrasse

  • Danse - Agenda

Anatomia Publica

Ce que le geste dit de nous : Tomeo Vergés [...]

Le mardi 12 février 2013
  • Théâtre - Gros Plan

Eyolf – Quelque chose en moi me ronge

Hélène Soulié met en scène Eyolf, d’Ibsen, [...]

Du mardi 12 février 2013 au 3 mars 2013
  • Théâtre - Critique

Le projet RW

Une flânerie onirique sous les pas craquants [...]

Du mardi 12 février 2013 au 16 février 2013