« C’est la faute à Molière ! » Virginie Augustin et Michaël Le Galli content avec malice l’histoire de la Comédie-Française
Virginie Augustin et Michaël Le Galli portent [...]
Et si Richard III n’était pas mort à la fin de la pièce éponyme ? Et s’il s’était enfui pour le Groenland, dans le but d’y fonder un nouveau royaume ? Alain Ayroles et Hervé Tanquerelle bâtissent un récit shakespearien, cruel, beau et froid comme un fjord. À paraître le 9 avril aux éditions Delcourt.
« C’est le malheur des temps que les fous guident les aveugles. » peut-on lire en épigraphe de cet épais roman graphique en cinq actes. Cette citation tirée du Roi Lear de Shakespeare cristallise le triste destin de cette colonie du Groenland, où les descendants de l’expédition d’Erik le Rouge en 982 subsistent avec peine. Abandonnés par la couronne danoise, ne connaissant plus l’art de lire les runes ni celui de construire les bateaux, ces ersatz de viking vivent pourtant paisiblement. Mais le Vatican, inquiété que cette terre dépourvue d’évêque retourne au paganisme, envoie un navire avec à son bord le prêtre Dom Mathias, où Richard embarque en tant que mercenaire. Tels des virus, ils vont pourrir le pays de l’intérieur, instaurant la tyrannie, excitant le fanatisme et faisant couler le sang pourpre sur cette « Terre Verte ». À ce petit jeu, le machiavélique Richard, rongé par la haine depuis sa défaite en Angleterre, va se montrer particulièrement vicieux. Sinistre dès le début, il n’en reste pas moins charismatique, et l’on se prendrait presque de tendresse pour lui lorsqu’il tombe amoureux de la guerrière Ingeborg, seule âme à avoir réussi à pénétrer son armure d’acier.
Crépuscule et aurore
Si Richard a réussi à échapper à la mort que lui réservait le dramaturge anglais, la fatalité lui colle à la peau. Comme un vestige, il s’exprime dans ce même langage empreint de mystère, qui transperce la laide vérité du monde autant qu’il ménage un espace à la beauté des tournures. Une langue qui fait écho au sublime des paysages, magnifiquement mis en couleur par Isabelle Merlet et Jérôme Alvarez. Au début de chaque chapitre/scène, des plans larges posent une tonalité, comme un changement de décor. Sur ces terres glacées, l’albédo réfléchit la lumière du soleil et éclaire les vices d’une société à son crépuscule. Faut-il abandonner la sédentarité et vivre comme les Inuits pour survivre à l’hiver ? Ceux que les colons appellent « Skraelings » et massacrent à la moindre occasion servent de boucs-émissaires à la démagogie de Richard. Incapable de remise en question, la petite communauté s’enlisera dans un comportement cupide et autodestructeur, jusqu’à réduire son destin à un choix : partir ou mourir.
Enzo Janin-Lopez
Parution le 9 avril 2025
https://www.editions-delcourt.fr/bd/series/serie-la-terre-verte/album-la-terre-verte
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