Théâtre - Critique

Kids

Kids - Critique sortie Théâtre


Le texte de Fabrice Melquiot est un modèle de partage égalitaire : moments choraux et partitions individuelles permettent à ses interprètes de jouer de toute la palette de leur art, et la répartition habile du discours et des émotions garantit les comédiens contre le risque du cabotinage et de l’enflure narcissique. Le choix de Kids est donc l’occasion, pour Gilles Bouillon (persuadé qu’il faut jouer pour devenir acteur), de prouver qu’il ne s’est pas trompé en créant, en 2005, le dispositif « Jeune Théâtre en Région Centre », qui permet aux élèves sortis des écoles de formation d’affirmer leur talent dans l’épreuve continuée du plateau. Mais ce spectacle ne se limite pas seulement à un exercice de débourrage, et l’exigeante mise en scène de Gilles Bouillon réclame des comédiens une audace, une verve, un sens du rythme et de l’écoute, une osmose dont ils savent faire preuve avec insolence, fraîcheur et une apparente facilité, aussi inattendues que jubilatoires.
 
Vive la jeunesse !
 
Le dispositif scénique bifrontal installe les comédiens sur une large piste, fermée d’un côté par une rampe de glisse acrobatique, de l’autre par un échafaudage. Les kids sautent, courent et virevoltent, jouent à la guerre, à l’école et à l’amour et mettent au point la parade, dont ils espèrent qu’elle va émouvoir les Occidentaux venus visiter leur pays dévasté. On est à Sarajevo, en février 1996, à la fin du siège interminable et meurtrier qui a laissé ces enfants orphelins. Livrés à eux-mêmes, ils réinventent la vie et les lois de la communauté avec autant de naïveté que de violence. Errant parmi les décombres, ils y ont récolté les pansements ensanglantés qui vont leur permettre de jouer le carnaval improbable pour lequel ils espèrent un public ému, qui saura leur venir en aide. Dessinant les différents décors d’un trait de craie au sol ou de quelques parpaings, accessoirisant leur jeu avec trois fois rien, prouvant qu’on peut faire théâtre de tout, interprétant leur personnages avec une vérité confondante et une justesse hyper maîtrisée, les jeunes comédiens tourangeaux, accompagnés à la guitare par Gabriel Bouillon, font le portrait d’une jeunesse sacrifiée, à la vitalité sidérante. Enlevé, équilibré, parfaitement chorégraphié et redoutablement efficace, ce spectacle est une magnifique ode à la jeunesse que Gilles Bouillon orchestre de main de maître.
 
Catherine Robert

Kids, de Fabrice Melquiot ; mise en scène de Gilles Bouillon. Du 6 au 17 décembre 2011. Du mardi au samedi à 20h30. Théâtre à Châtillon, 3, rue Sadi-Carnot, 92320 Châtillon. Tél : 01 55 48 06 90. Durée : 1h30. Spectacle vu au Nouvel Olympia – CDR de Tours.

A propos de l'événement




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