Le Cas Sneijder
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Commande du Deutsches Schauspielhaus de Hambourg et du Quai à Angers, la nouvelle pièce de Marie NDiaye se penche sur les parts d’ombre de notre système de représentation démocratique. Une fable entre drôlerie corrosive et étrangeté, mise en scène par Frédéric Bélier-Garcia.
Les temps sont aux questionnements sur les limites et les carences de nos systèmes de représentation démocratique. Sur l’échelle des valeurs et des aptitudes que l’on souhaite voir incarner par nos représentant-e-s politiques. Election de Donald Trump, succès des populistes britanniques lors du référendum sur le Brexit, affaires Cahuzac et Fillon, succession de mises en examen au Front national… : les régimes démocratiques des nations occidentales sont-ils en crise ? La nouvelle pièce de Marie NDiaye ne pose pas cette question de façon aussi frontale. C’est par le biais de lignes dramaturgiques beaucoup plus énigmatiques que l’écrivaine explore, dans Honneur à Notre Elue, le champ de l’action politique. Au sein de cette fable à la lisière du concret et du fantastique, une femme (Notre Elue, Isabelle Carré) portée triomphalement, depuis plus de dix ans, à la tête de sa commune, doit faire face à une stratégie de campagne toxique mise en place par son adversaire politique (L’Opposant, Patrick Chesnais). Les élections sont dans six mois. L’opposition semble prête à tout pour enfin conquérir le pouvoir.
Le pragmatisme et la vertu en politique
Comment la figure de vertu et de probité que représente cette femme va-t-elle réagir au piège qui lui est tendu ? En restant simple, droite et digne, c’est-à-dire scrupuleusement fidèle à elle-même, refusant de se mêler, de prêt ou de loin, à l’action qui est menée contre elle. De scène en scène, Marie NDiaye déploie les différents tableaux d’une histoire qui ne se contente pas de soulever la question passionnante de l’éthique en politique. Elle s’éloigne également du strict réalisme pour investir – à la manière d’une rêverie – la part secrète des êtres et de leur existence. Aux côtés des deux acteurs principaux, Jean-Charles Clichet, Romain Cottard, Jan Hammenecker, Jean-Paul Muel, Chantal Neuwirth, Agnès Pontier, Christèle Tual servent avec beaucoup d’acuité les perspectives de cette pièce ambitieuse. Dommage que la mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia ne donne pas plus d’ampleur au trouble et au mystère qui la composent. On reste ici, essentiellement, dans la lumière crue du quotidien. Et on passe à côté des cavités, des zones d’ombre et de déséquilibre qui font la singularité de cette tragi-comédie à dimension onirique.
Manuel Piolat Soleymat
Salle Renaud-Barrault. Du 1er au 26 mars 2017 à 21h, le dimanche à 15h. Relâches les lundis et le 5 mars. Spectacle vu le 4 février 2017 au Quai – Centre dramatique national / Angers - Pays de la Loire. Durée de la représentation : 1h45. Tél. : 01 44 95 98 21. www.theatredurondpoint.fr.
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