Théâtre - Entretien /Festival d'Avignon 2021

Gulliver, le dernier voyage, mise en scène de Madeleine Louarn et Jean-François Auguste

Gulliver, le dernier voyage, mise en scène de Madeleine Louarn et Jean-François Auguste - Critique sortie Théâtre Avignon Festival d’Avignon. Théâtre Benoît XII


Librement inspiré des Voyages de Gulliver de Jonathan Swift et réécrit pour le théâtre par les interprètes de l’Atelier Catalyse / mes par Madeleine Louarn et Jean-François Auguste

Pourquoi ce retour à Gulliver ?

Madeleine Louarn : Nous revenons à lui par un chemin détourné. Notre projet initial était de nous frotter au Bourgeois gentilhomme dont le mamamouchi au costume et aux mœurs fantaisistes m’a rappelé le travail que nous avions fait autour de Gulliver il y a vingt-cinq ans. Je ne me souvenais pas de ce dernier voyage (on connaît mieux ceux à Lilliput, Brobdingrag et au pays des Houyhnhnms), or il est presque hallucinant de voir comment il parle à notre époque. Gulliver y croise des gens paniqués par la fin du monde et il y est question de la fin des corps, de la maladie, du vieillissement d’une manière extraordinairement forte. Ce n’est pas tant nos précédents spectacles qui nous ont ramenés à Gulliver que la situation actuelle.

Jean-François Auguste : Nous voulions aussi un spectacle tout public pour nous adresser à la jeunesse et lui offrir l’occasion de rencontrer les acteurs de Catalyse. Pour ces derniers, ce public est l’occasion de se repositionner et, pour nous tous, de repenser le rôle de l’acteur, car le public jeune ne pardonne aucun faux pas.

« Swift est un fantaisiste réjouissant. »

Pourquoi les acteurs de Catalyse ont-ils participé à l’adaptation ?

J.-F. A. : Nous sommes passés par l’écriture pour que le spectacle traverse leur rapport au monde, explore ce qui les met en colère, ce qu’ils trouvent beau…

M. L. : Ce qui permet de travailler sur leur propre langage et offre à la fin un Swift d’aujourd’hui et de tous les temps. Leur sincérité et leur enthousiasme dans l’engagement particularisent et exaltent la qualité de leur jeu.

J.-F. A. : La beauté de leur écriture tient aux chocs de sens qu’elle fait naître par une façon d’avoir des idées qu’on n’a pas l’habitude d’entendre. Le même décalage apparaît par leur jeu puisqu’ils ne jouent pas les non-sens, ce qui, justement, nourrit l’absurde : grâce à eux, on rit à un endroit où l’on n’imaginait pas qu’on allait rire.

 Dans quelle mesure Swift parle-t-il à notre époque ?

J.-F. A. : Covid ou pas, Swift nous parle surtout de la condition humaine traversée de paradoxes. Ainsi l’île peuplée d’immortels qui n’ont pas la jeunesse éternelle et sont des vieillards cacochymes et grabataires. Voilà qui raconte beaucoup notre société et sa volonté de toujours faire reculer la mort.

M. L. : Swift répond d’abord à son époque pleine de doutes, de tensions politiques et d’inquiétudes face à l’avenir. Disons qu’il fait écho à notre époque et nous permet d’essayer d’être un peu moins bêtes. Il parle de choses graves et profondes et est toujours très drôle. Ce satiriste incisif – le meilleur démolisseur des utopies, disait Cioran – est un fantaisiste réjouissant. Sans doute que ce spectacle est le plus drôle que nous n’ayons jamais fait !

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement


Gulliver, le dernier voyage, mise en scène Madeleine Louarn et Jean-François Auguste
du lundi 19 juillet 2021 au samedi 24 juillet 2021
Festival d’Avignon. Théâtre Benoît XII
12 Rue des Teinturiers, 84000 Avignon

à 18h. Tél. : 04 90 14 14 14. Durée : 1h20.


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