Théâtre - Critique

Fée de Fred Tousch

Fée de Fred Tousch - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de Belleville


Théâtre de Belleville / de et avec Fred Tousch

La pensée, la réflexion sur les grandes questions d’actualité, prennent toujours chez Fred Tousch des formes incongrues. Loufoques, volontiers extravagantes. Depuis la création de sa compagnie le Nom du Titre en 2001, l’artiste qui se définit comme « comédien, poète et philosophe de l’absurde » a commencé par faire le clown conférencier avec deux compères, Arnaud Aymard et Laurent Mollat dans Les Rendez-vous de la cervelle. Une « revue qui cherche et qui finit par trouver des solutions aux problèmes qui nous accablent », tels que le réchauffement de la planète, la surpopulation, l’ennui, l’immortalité ou encore l’insécurité. Régulièrement, ce drôle de cabaret reprend du service, de même que les spectacles suivants de Fred Tousch, comme La Foirce, où l’artiste se fait bonimenteur, proposant contre rémunération de déplacer un monument de la ville. Comme Maître Fendard également, où il incarne un « avocat spécialisé dans les affaires à caractère iconoclaste et surréaliste », et l’« odyssée initiatique et cosmétique » FLEUR, dans laquelle il se fait végétal pour poser une question majeure mais trop rarement abordée sur nos scènes : celle de l’existence ou de l’inexistence du shampoing. Fée s’inscrit donc dans une série de métamorphoses. Déguisé en créature de fable, Fred Tousch continue d’aborder des sujets graves à sa manière bouffonne, carnavalesque. Laquelle prend hélas le pas sur l’écriture et les idées. Sur le constat des violences et tragédies diverses que le comédien a choisi d’explorer.

Le monde à la baguette

Avec la chute de l’albatros Polystyrène qui ouvre la pièce, Fred Tousch affirme d’emblée son désir de s’affranchir des codes de l’univers du conte. D’en tourner en dérision le merveilleux par un bricolage très simple, enfantin. L’oiseau, en effet, est tout en carton. Il est à l’image de sa propriétaire, la fée Cristaline, qui apparaît bientôt parée d’une robe bleue style princesse de cour de récré. Pleine de strass et de dentelles qui jurent avec l’allure de son propriétaire, qui n’est pas sans faire remarquer l’anomalie. Ce travestissement aurait pu donner lieu à un jeu comique, à un registre absurde, justifiant l’approche simpliste de questions complexes telles que la pauvreté dans le monde, la peur de l’Autre, le réchauffement climatique… Ou du moins, en atténuant l’effet, d’autant plus important que le texte de Fred Tousch se fonde sur une imagerie bien connue, centrale dans la pop culture, sans en interroger profondément les codes : celle du super-héroïsme. Ayant pour mission de redonner à l’humanité « le sens de l’envie et le goût des utopies », la fée du spectacle a tendance à se noyer dans des développements peu originaux sur l’individualisme et la société de consommation, sur la fameuse perte de sens contemporaine. Au détriment de la partie la plus singulière du texte, qui concerne les coulisses de l’univers du conte. Où l’on apprend par exemple comment a été conçue la robe de Cendrillon. Assez participatif, Fée se déploie sans doute mieux en extérieur qu’en salle, où il se tient aussi étriqué que Fred Tousch dans son costume baroque.

Anaïs Heluin

A propos de l'événement


Fée
du jeudi 3 octobre 2019 au dimanche 29 décembre 2019
Théâtre de Belleville
94 rue du Faubourg du Temple, 75011 Paris

Du mercredi au samedi à 19h15, le dimanche à 15h. Relâche le 25 décembre. Tel : 01 48 06 72 34. www.theatredebelleville.com


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