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Jazz / Musiques - Entretien / Jazz
Il y a vingt ans, Jean-Rémy Guédon a expérimenté la collision fructueuse entre jazz et musique contemporaine. Depuis l’Ensemble Archimusic s’est imposé au fil de créations subtiles, littéraires et métissées comme l’un des grands ensembles les plus originaux de la scène hexagonale. Pour célébrer ces deux décennies d’alchimie, le compositeur-saxophoniste et ses complices organisent quatre soirées de « concerts gourmands ».
Est-ce que vous vous attendiez à fêter un jour les vingt ans d’Archimusic ?
Jean-Rémy Guédon : Non parce que je n’ai même pas décidé de créer l’Ensemble Archimusic (rires). On jouait un soir avec mon quartette et j’avais demandé à quelques amis de jouer une première partie de musique contemporaine… Et je m’étais dit : s’il y a un rappel, ce serait sympa qu’on joue tous ensemble. On a tous été étonné par le son et, du coup, je l’ai nourri.
C’était donc un pur hasard ?
J.-R. G. : Oui… ou plutôt une intuition. Parce que je réunissais déjà à l’époque à peu près tout ce qui tournait autour de mon monde… Être créateur, c’est organiser un petit peu autour de soi les matières premières qu’on croise. C’est se faire des petits mondes à soi avec le monde qui nous entoure.
Comment fonctionne le monde d’Archimusic ? En démocratie participative ou en monarchie absolue ?
J.-R. G. : Dites carrément une dictature ! (rires) J’ai coutume de prendre une image : je serais comme un capitaine qui ne touche jamais la barre sauf quand il voit un iceberg. Et si je dois je la prendre, personne ne peut me dire quelque chose. C’est plutôt une sorte de non-dirigisme attentif. Je suis né dans un habitat communautaire et mine de rien, sans m’en rendre compte, j’ai appris à faire avec pas mal d’amis. Et je sais utiliser la force des gens et leurs aspects créatifs.
En vingt ans, est-ce que la vie est devenue plus dure pour un grand ensemble ?
J.-R. G. : Vaste question… Vingt ans pour un grand ensemble, c’est rare : avec le temps, on est donc mieux répertorié. Les gens qui nous font confiance vérifient qu’on est bien en vie et actifs et nous suivent plus facilement… Mais j’ai mis dix ans à avoir les premiers subsides… A force de durer, on finit par devenir une « institution » (rires)… Ce qui est rigolo, c’est que le fait d’être composé à moitié de musiciens de formation classique et à moitié de musiciens de jazz n’a pas fait école du tout. Alors qu’on a intuitivement simplement reproduit les origines du jazz, à savoir un mélange de spirituals africains et de musique classique européenne. On est revenu aux sources sans le savoir…
L’un des fils rouges de l’ensemble, ce sont les créations « littéraires » inspirées par Sade, Cervantès ou dernièrement Nietzsche. D’où vient cette volonté de se tourner vers les mots ?
J.-R. G. : La réponse est assez simple : je n’ai pas le sentiment d’être spécialement doué pour ne pas utiliser tout ce que j’ai en rayon ! Je n’ai pas de complexes, mais j’ai ce désir : si je prépare un repas et que j’ai des ingrédients, je les utilise tous.
Avez-vous encore des rêves à accomplir avec Archimusic ?
J.-R. G. : Avec les contraintes économiques qu’on a, si je n’étais pas persuadé que c’est le plus bel outil pour traduire au monde ce que je sens, j’arrêterais tout de suite. On a 20 ans et on est jeunes ! Jeune ans le sens de dynamique. Le jour où je ne rêverai plus, ce sera fini. On dit que les artistes sont de grands rêveurs mais c’est tout le contraire : on transforme nos rêves en réalités.
Propos recueillis par M. Durand
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