Colossus de Stephanie Lake

Grâce à Stephanie Lake, la relève de la scène contemporaine australienne est assurée. Interprète hors pair, remarquée dans les célèbres compagnies océaniennes de Chunky Move ou Lucy Guerin Inc, elle s’impose rapidement dans la sphère chorégraphique en montant sa compagnie en 2013 à Melbourne. Applaudie pour sa danse fluide et brute, où le corps semble désarticulé, elle séduit le public avec entre autres les subtils DUAL (2013) et Double Blind (2016). En 2018, elle foulait, avec sa compagnie, les planches de Chaillot avec l’ésotérique Pile of Bones. En 2021, elle revient avec le grisant Colossus, créé trois ans plus tôt, où elle fait encore une fois la part belle au collectif : « J’explore depuis plusieurs années les tensions qui existent entre l’individu et le groupe, que ce soit la beauté générée par l’action collective ou la laideur des émeutes. Je crois que le collectif est très puissant. » explique la chorégraphe.

Création grandiose

La mise en scène est saisissante : 54 danseuses et danseurs du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris (CNSMDP) occupent l’espace et l’animent. On est frappé par la grâce de cet ensemble, qui rappelle la danse des bancs de poissons et la synchronisation des vols d’étourneaux. « Je voulais explorer les dynamiques qui régissent un grand groupe : comment partageons-nous l’espace ? Comment coopérons- nous ? Qui émerge comme leader ? Que se passe-t-il si le groupe se retourne contre lui-même ? Ou, au contraire si les individus collaborent ? » ajoute-t-elle. Chaque interprète y brille par sa singularité, physique comme stylistique, à la fois à l’écoute de sa musique intérieure et porté par l’énergie du groupe. Une danse organique, rituelle, où évoluent des êtres qui semblent mus par des forces magiques.

Belinda Mathieu