Théâtre - Critique

« Vacarme(s) ou comment l’Homme marche sur la Terre », mise en scène Thomas Pouget, évoque les heurs et malheurs de la condition paysanne d’aujourd’hui

« Vacarme(s) ou comment l’Homme marche sur la Terre », mise en scène Thomas Pouget, évoque les heurs et malheurs de la condition paysanne d’aujourd’hui - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de Belleville


Théâtre de Belleville / Texte de François Pérache / Mise en scène de Thomas Pouget

Basée en Lozère, la compagnie La joie errante est venue à Paris travailler « en décentralisation », comme elle le dit malicieusement. Car la culture ne se partage pas que dans un sens. Il s’agit pour la compagnie avec Vacarme(s) de donner à percevoir les problématiques d’un monde agricole – celui des paysans plus que des grands exploitants –  dont on ne connaît que très théoriquement la situation de ce côté-ci de la France. Nourri de plus de 150 témoignages d’agriculteurs que la compagnie a recueillis avant d’en confier la matière à François Pérache, le texte en forme de chronique familiale relate la vie d’un enfant de paysan devenant paysan lui-même. Le spectacle traverse les questions de la transmission, du poids de la famille, des transformations du système agricole, de l’endettement mais aussi de la place des femmes et plus largement des bonheurs et malheurs ordinaires du quotidien des campagnes. Construit autour du personnage de Pierre Gayard, interprété par Sylvain Lecomte, avec Thomas Pouget – également metteur en scène du spectacle – et Grégoire Le Stradic qui endossent de leur côté les rôles d’une quinzaine d’autres personnages, le spectacle et ses trois comédiens, jeunes trentenaires, nous embarquent à travers champs dans une tranche de vie à la croisée de la tradition et de la modernité.

La bascule des époques

Le texte de François Pérache, toutefois, à vouloir trop brasser et embrasser, se disperse et court à la surface des choses, montre et dit davantage qu’il ne fait ressentir. La faute certainement, en tout premier lieu, à un dispositif compliqué, une narration par allers-retours autour de la date fatidique des 43 ans du héros conjugué à une exhibition initiale du processus de création. Tout du long, narration et jeu s’entrecroisent, se superposent, se répètent, si bien que souvent le plateau rejoue les mots, représente ce qui a été annoncé sans y apporter de véritable surprise. Quelques scènes telles celle du Loto nous font bien sentir la bascule des époques, et les tensions économiques d’un monde en voie de disparition affleurent. Autour d’un tas de terre, avec une seule pelle et une volontaire économie d’accessoires, les trois comédiens déploient une belle énergie, virevoltent autour de quatre servantes – des lampes – dans une densité et un débit de la parole parfois excessifs. L’histoire aurait gagné à être allégée et simplifiée mais le monde paysan devient grâce à Vacarme(s) bien moins étranger, et même proche et familier, à travers des figures d’aujourd’hui débarrassées de tout pittoresque, plongées dans un quotidien où le bonheur peine à se construire et se fait de plus en plus difficile à décrocher.

Eric Demey

A propos de l'événement


Vacarme(s) ou comment l’Homme marche sur la Terre
du jeudi 2 novembre 2023 au jeudi 30 novembre 2023
Théâtre de Belleville
16 passage Piver, 75011 Paris

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