Classique / Opéra - Gros Plan

Tristan und Isolde revu par Tiago Rodrigues

Tristan und Isolde revu par Tiago Rodrigues - Critique sortie Classique / Opéra Caen THEATRE DE CAEN


Théâtre de Caen

En 2016, après une représentation de Sopro à Avignon, Tiago Rodrigues avait reçu une première proposition de mettre en scène un opéra de la part de Matthieu Dussouillez, alors à Dijon, qui devant son hésitation, avait renouvelé son invitation lorsqu’il a pris la direction de l’Opéra de Lorraine à Nancy. L’homme de théâtre portugais avait alors accepté, à la condition que l’ouvrage soit Tristan et Isolde de Wagner, son «opéra préféré». Une «histoire tragique où l’amour devient synonyme de transgression sociale et politique parce que le mythe se situe au niveau des rois : il y a Marke, il y a le royaume, il y a la guerre et il y a cette paix scellée par le mariage du Roi avec cette princesse irlandaise. Obligés de se cacher, ils voient leur intimité toujours menacée puisqu’il leur est interdit de s’aimer.» Cela a conduit Tiago Rodrigues « à travailler sur l’idée de l’ombre, qui correspond à l’opposition entre le jour et la nuit dans le livret », traduite dans le spectacle à travers les deux danseurs qui sont comme les ombres de Tristan et Isolde.

Une traduction en 947 pancartes

Son approche du chef-d’œuvre de Wagner se souvient de son parcours où son intérêt pour l’opéra est venu sur le tard, le genre ne faisant pas partie de ses goûts de jeune vivant dans la banlieue de Lisbonne, et prend le contre-pied de certaines habitudes du monde lyrique. Aux surtitres auxquels le public est désormais accoutumé, le metteur en scène a choisi de substituer un texte de sa main qui résume et commente l’action. Cette réinterprétation des mots de Wagner est distribuée en 947 pancartes que manipule un couple de danseurs depuis une bibliothèque d’archives – Sofia Dias et Vitor Roriz qui avaient déjà participé à son Antoine et Cléopâtre. L’enjeu est de « déplacer le regard du public sur l’opéra, de retrouver une connexion sensible à la musique et à ce qui se joue sur scène », que l’on pouvait avoir lorsque les œuvres étaient données en langue vernaculaire – jusqu’au milieu du XXe siècle. Par ce dispositif qui façonne une forme de distanciation héritée de Brecht, Tiago Rodrigues, qui a été marqué par la vidéo de la production d’Heiner Müller à Bayreuth, entend également aller contre la tentation de l’emphase induite par la musique et les personnages. Dans les rapports entre ces derniers, il recherche la vérité de l’amitié et non les apparences de la suzeraineté. La gestuelle sobre, quasi-stylisée, illustre la vision du metteur en scène pour qui Tristan et Isolde est d’abord « un opéra d’émotion ».

Gilles Charlassier

A propos de l'événement


Tristan und Isolde
du vendredi 31 mars 2023 au dimanche 2 avril 2023
THEATRE DE CAEN
135 boulevard Maréchal-Leclerc, 14000 CAEN

Vendredi 31 mars 2023 à 19 heures et dimanche 2 avril 2023 à 15h30.


Tél : 02 31 30 48 00.


Durée : 4h40 avec deux entractes.


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