Théâtre - Critique

Tout mon amour

Tout mon amour - Critique sortie Théâtre Paris la colline


La Colline/Laurent Mauvignier/ mes de Rodolphe Dana

Les fiançailles entre le collectif les Possédés et Laurent Mauvignier se sont nouées il y a deux ans autour de Loin d’eux, très beau monologue mené par Rodolphe Dana, adapté d’un texte émouvant où un fils raconte à sa famille cette solitude qui le mène au suicide. Tout mon amour  développe aussi une affaire de famille, que Mauvignier a expressément imaginée pour le théâtre cette fois-ci, pour le collectif les Possédés en particulier.  En ce soir de première au théâtre Garonne, l’essai n’est cependant pas transformé, et si elles ne débouchent pas sur un divorce, les promesses soulevées par les  fiançailles n’augurent pas d’un mariage durable entre l’écrivain et la compagnie. En cause certainement, une question de style. En effet, si la simplicité dans l’adaptation de Loin d’eux collait au registre du texte d’origine et en magnifiait la langue, si l’esprit caustique de John Cheever faisait de Bullet Park – la précédente création des Possédés – un roman idéal pour la fantaisie sérieuse de cette compagnie, Tout mon amour semble en revanche leur poser difficulté, jusqu’à donner l’impression que ce genre de texte n’est pas vraiment fait pour eux.

La patte jubilatoire de ce collectif

De l’intrigue de cette pièce, on ne peut raconter beaucoup sans affadir sa dramaturgie, dont le ressort principal réside dans le dévoilement progressif d’un secret de famille. L’action commence très classiquement à l’occasion d’un enterrement au cours duquel une mystérieuse jeune fille, par ses révélations,  vient bouleverser l’équilibre triangulaire d’un couple et de leur fils unique adolescent. Petit à petit, les pièces du puzzle s’assemblent pour reconstituer le passé de cet étrange clan, dans un registre plutôt réaliste que viennent contrebalancer les apparitions surnaturelles du père à peine enterré, incarné avec sa facétie habituelle et  efficace par Simon Bakhouche. De la langue romanesque de Mauvignier, on ne retrouve pas grand-chose dans Tout mon amour, sauf à l’occasion de quelques monologues où la phrase s’étire à volonté pour explorer les méandres du sentiment et du souvenir. Ce ne serait pas un problème si l’auteur parvenait à se forger un style théâtral plus singulier, plus affirmé, à la fois dans la construction dramaturgique et dans le dialogue. Car Tout mon amour offre finalement une histoire de facture classique, joue d’assez peu de variations de registres, et le parler pseudo-naturel des comédiens des Possédés, leur art du dérapage contrôlé, de la représentation entre fiction et réalité, bref, ce qui fait habituellement la patte jubilatoire de ce collectif affleure dans le spectacle mais ne parvient jamais vraiment à s’y développer. A la toute fin, habilement, l’intérêt du spectacle se déporte sur la figure maternelle et les insupportables effets de l’absence. Mais  ce soir-là, rien auparavant n’avait  malheureusement permis de s’y attacher.

Eric Demey

A propos de l'événement


Tout mon amour
du mercredi 21 novembre 2012 au vendredi 21 décembre 2012
la colline
15 rue Malte-Brun, 75020 Paris
Du 21 novembre au 21 décembre, du mercredi au samedi à 21h, mardi à 19h et dimanche à 16h. Tél : 01 44 62 52 52. Durée : 1h20. Spectacle vu au Théâtre Garonne à Toulouse.

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