Théâtre - Critique

Points de non-retour [Quais de Seine] d’Alexandra Badea

Points de non-retour [Quais de Seine] d’Alexandra Badea - Critique sortie Théâtre Paris La Colline – Théâtre National


La Colline – Théâtre national / texte et mes Alexandra Badea

Le 17 octobre 1961, à Paris, la police française, sur ordre du préfet de police Maurice Papon, réprime dans le sang une manifestation d’Algériens organisée par le FLN. C’est cet événement meurtrier (les chiffres, quoiqu’incertains, laissent entrevoir plusieurs dizaines de morts et une centaine de disparus) qu’Alexandra Badea a placé au cœur de Points de non-retour [Quais de Seine]**, spectacle créé en 2019 lors du Festival d’Avignon et aujourd’hui repris au Théâtre de la Colline. Nous retrouvons Nora (Sophie Verbeeck), journaliste qui enquêtait sur le massacre de Thiaroye dans le précédent opus de la trilogie imaginée par l’autrice et metteuse en scène d’origine roumaine. Aux côtés de ce personnage, au sein d’une scénographie de Velica Panduru qui scinde le plateau en deux parties (à l’avant de la scène, se jouent les circonstances du présent ; à l’arrière de la scène, derrière un tulle, surgissent celles du passé), nous faisons la connaissance d’un thérapeute (Kader Lassina Touré), ainsi que d’un couple (Irène / Madalina Constantin et Younes / Amine Adjina) qui tente de vivre son amour malgré les bouleversements qu’entraîne la Guerre d’Algérie.

Le massacre parisien du 17 octobre 1961

Comme c’était le cas  dans Thiaroye, ce second volet d’Alexandra Badea nous plonge dans un croisement de récits mêlant grande et petites histoires pour éclairer les implications des désordres politiques sur les existences intimes. Une fois encore, ce théâtre réparateur, qui vient mettre en lumière des événements maintenus dans l’obscurité, nous touche. Même s’il apparait moins ample, ici, que dans le premier volet de Points de non-retour. La faute à quelques concessions faites au mélodramatique, à certaines perspectives de jeu et d’écriture qui auraient gagné à davantage de complexité. Bien sûr, c’est dommage. Mais ces faiblesses finissent peu à peu par s’estomper pour laisser rayonner la lucidité d’un projet de théâtre authentique et valeureux. Un projet qui nous place face à d’utiles considérations sur la construction des êtres et des vies, sur la violence du silence et l’oppression de l’oubli. La trilogie s’achève par Diagonale du vide, un spectacle sur l’histoire de l’Ile de la Réunion et l’affaire des « Enfants de la Creuse ».

* Critique dans La Terrasse n° 269, octobre 2018.

** Texte publié chez L’Arche Editeur.

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement


Points de non-retour
du mercredi 12 janvier 2022 au dimanche 6 février 2022
La Colline – Théâtre National
15 rue Malte-Brun, 75020 Paris

Points de non-retour [Quais de Seine] les jeudis à 20h30 • durée 1h40. Spectacle vu lors de sa création au Festival d’Avignon, au Théâtre Benoît XII, le 12 juillet 2019.

Les samedis à 14h30 et dimanches à 12h, la trilogie est présentée en version intégrale • durée 7h avec 2 entractes.


Points de non-retour [Thiaroye] les mercredis à 20h30

Points de non-retour [Diagonale du vide] les vendredis à 20h30


Tél. : 01 44 62 52 52. www.colline.fr


 


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