Théâtre - Entretien Jacques Bonnaffé

Pierre Michon et la lutte des classes

Pierre Michon et la lutte des classes - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre 71


Que raconte cette histoire du Roi du bois ?

Jacques Bonnaffé : Le Roi du bois est presque une nouvelle, un livre composé de courts chapitres qui tournent autour d’un choc initial : un garçon de douze ans, de la plus basse extraction – il garde les cochons dans les bois – voit pour la première fois les apparats, la richesse, mais aussi les dessous du raffinement et de la préciosité : tandis qu’il épie des peintres exerçant leur art dans la nature, il voit une femme descendre d’un carrosse pour aller pisser dans le fossé. A la porte du carrosse, un homme se moque d’elle très gaillardement. C’est le peintre Le Lorrain qui se piquera d‘emmener cet enfant avec lui, fasciné par sa langue et ses appeaux. Et Gian Domenico Desideri va ainsi rentrer dans le monde, une expérience dont il sortira bouilli d’amertume et de dépit.

L’enfant deviendra donc l’élève du Lorrain ?

J.B. : Quand il voit cette femme pisser, l’enfant est placé en contrebas. Pour autant, ce n’est pas ce sexe qui l’intéresse, mais tout ce qui constitue cet événement. D’autres auraient fait quinze bicyclettes bleues avec ça. Mais avec Michon, ça devient une illumination.  Il y a toujours chez Pierre Michon une naissance rimbaldienne. Il possède la force d’insurrection de Rimbaud d’être nulle part dans le monde mais de toujours y être de façon polémique. Car cette histoire parle avant tout de la lutte des classes. Ce gamin ne peut pas s’extraire de sa condition mais il est véritablement ébloui par la beauté, la splendeur. « Je peins pour être prince » répète-t-il.

« Comme beaucoup, j’ai eu un éblouissement face à l’écriture de Pierre Michon. »

Comment avez-vous découvert ce texte ?

J.B. : Porter ce texte à la scène est un projet que nous avons depuis longtemps avec Sandrine Anglade. J’ai une sorte de lenteur intérieure et  le loisir de pouvoir traîner dans un texte, d’y revenir, de le laisser vivre en moi, parce que ce n’est que si l’écriture vit en moi que je peux transmettre quelque chose de vibrant. Bien sûr, comme beaucoup, j’ai eu un éblouissement face à l’écriture de Pierre Michon. Ici, on sent sa volonté de s’approcher de son sujet avec la perfection des maîtres, à la manière des peintres,  de porter le plus haut possible son effort de représentation.

S’agit-il d’un opéra parlé ?

J.B. : Effectivement. La musique de Michèle Reverdy précède le travail de mise en scène. Avec un quatuor de musiciens, il y aura également sur scène un enfant chanteur. Le texte n’étant pas à la première personne, il pose la question de savoir qui se cache à l’intérieur du narrateur. Et c’est peut-être une voix d’enfant.

Propos recueillis par Eric Demey

A propos de l'événement


Le Roi du bois
du mardi 2 octobre 2012 au samedi 13 octobre 2012
Théâtre 71
3 place du 11 novembre à Malakoff
Mardi et vendredi à 20h30, mercredi, jeudi et samedi à 19h30, dimanche à 16h. Tél : 01 55 48 91 00. Les 24, 25 et 26 octobre à la ferme de Bel Ebat à Guyancourt. Tél : 01 30 48 33 44. Les 14 et 15 novembre à l’auditorium Jean-Pierre Miquel à Vincennes. Tél : 01 53 66 16 70.

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