Théâtre - Critique

Pédagogies de l’échec

Pédagogies de l’échec - Critique sortie Théâtre Paris Vingtième Théâtre


CRITIQUE/Vingtième Théâtre / De Pierre Notte / mes Alain Timar

Dans un monde d’après la catastrophe, vide et en ruines, dans un bureau au septième étage d’un immeuble, la supérieure et l’assistant de direction persistent à entretenir une relation de travail bien huilée, nourrie de petits jeux mesquins de pouvoir, d’asservissement et de domination. Plus d’outils de travail. Plus de production. Plus rien à part un grand trou. Mais certains louent des échafaudages très cher pour une reconstruction qui n’a pas lieu… Et le dossier Delamain doit être finalisé… C’est la force d’un système ultra rodé et indéboulonnable qui se maintient malgré une évidente irrationalité et une accumulation d’échecs en tous genres, et la comédie désespérée, simple, très concrète et sans véritable crescendo, génère des situations absurdes, tendues et loufoques. Après la famille et les affres existentielles, Pierre Notte s’attaque au monde du travail avec toujours le même talent vif, moqueur et tranchant, qui rit de la tragédie, et toujours la même envie de dégommer les schémas imposés et d’ôter les vernis cache-misère. Au-delà des stéréotypes sexistes attendus, l’auteur laisse le metteur en scène choisir l’identité sexuelle des protagonistes : l’assistant(e) et le(la) supérieur(e).

Scénographie métaphorique

Directeur du Théâtre des Halles à Avignon, scène emblématique présentant un théâtre exigeant et ouvert à de multiples esthétiques, admirateur de Kafka, Beckett ou Ionesco, Alain Timar œuvre sans relâche contre toute forme de cloisonnement et d’étriquement de la pensée. Il a créé Pédagogies de l’échec avec succès lors du dernier Festival d’Avignon avec Olivia Côte dans le rôle de la supérieure et Salim Kechiouche dans celui de l’assistant. Deux excellents comédiens dont le jeu est relié à une scénographie spectaculaire et métaphorique qui contraint les corps, évoquant le risque et le danger. Un plateau surélevé de 3,50 mètres sur 3,50 mètres s’incline imperceptiblement jusqu’à atteindre un angle de 45 degrés, obligeant les protagonistes à s’accrocher pour ne pas tomber. Une telle scénographie détermine une chorégraphie des corps millimétrée, tout à fait en phase avec le propos, la relation tout entière étant engluée dans des rapports de hiérarchie, mais, par contre, elle privilégie la contrainte physique au détriment de l’étrangeté des situations, et d’une certaine manière parfois bride le burlesque et le suspense en l’inscrivant dans ce cadre strict. La pièce est un écho incisif à l’imminence de la catastrophe si souvent invoquée en ce début de 21ème siècle !

Agnès Santi

A propos de l'événement


Pédagogies de l’échec
du vendredi 28 août 2015 au dimanche 25 octobre 2015
Vingtième Théâtre
7 Rue des Plâtrières, 75020 Paris, France

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