Théâtre - Critique

Où les cœurs s’éprennent

Où les cœurs s’éprennent - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Bastille


Théâtre de la Bastille / d’après Eric Rohmer / mes Thomas Quillardet

Le cinéma est en vogue ces derniers temps au théâtre et tout particulièrement celui de la Nouvelle Vague. On avait beaucoup aimé La Maman et la Putain, film de Jean Eustache, adapté l’année dernière par Dorian Rossel. Mais on est moins convaincu par ce travail qu’effectue Thomas Quillardet à partir de deux films de Rohmer, Les Nuits de la Pleine Lune et Le Rayon vert. Pour rappel, Les Nuits de la Pleine Lune raconte comment une jeune femme tente de s’aménager une liberté dans son couple, quitte à sortir régulièrement seule le soir et à vivre alternativement dans son studio parisien et à Marne-la-Vallée avec son fiancé. Le Rayon vert se centre, lui, sur une héroïne un peu ronchonne, lâchée par une amie à la veille des vacances, qui doit s’accommoder cet été-là de sa solitude, tout en rêvant au grand Amour. Deux personnages féminins que relie donc la solitude – l’une cherche à la construire au sein du couple, l’autre à la dépasser mais pas à n’importe quel prix – et qui sont très bien incarnées successivement par Marie Rémond et Anne-Laure Tondu.

Ces amourettes aussi ordinaires que graves

La scénographie est simple : plateau dépouillé entouré de chaises où s’assoient les comédiens quand ils ne sont pas en jeu, une maquette de train pour figurer les déplacements entre Paris et la banlieue, un espace de jeu recouvert de carton qu’on découpera pour figurer un journal, un lit… Un dispositif léger, modulable et astucieux pour un théâtre qui veut surtout faire entendre les dialogues de Rohmer et laisser respirer la sensibilité à la fois singulière et universelle de ses personnages. Les deux pièces se suivent, Les Nuits de la pleine lune conforme aux dialogues du scénario, Le Rayon vert qui s’en écarte un peu via une réécriture de plateau. Et l’on retrouve avec plaisir la fausse légèreté des films de Rohmer, ces amourettes aussi ordinaires que graves, qui prennent au sérieux sans les dramatiser à outrance les incertitudes du cœur. Est-ce cela – du drame – qui manque ? Le charme subtil des films de Rohmer peut-il passer la rampe ? De toute évidence, le plaisir des acteurs à s’emparer des situations et dialogues du cinéaste transparaît tout du long. Il y a là, c’est vrai, une belle matière à jouer et de bons comédiens pour s’en emparer. Mais, d’un autre côté, le jouer faux si caractéristique du cinéma de Rohmer, une forme d’humour, d’incongruité, un certain art du naturel, tout cela disparaît. Ce n’est pas rédhibitoire en soi, c’est le jeu de l’adaptation. Mais, en retour, on aurait aimé voir davantage ce que le plateau apporte à ces films, que se dessine plus clairement l’intérêt de les transposer.

Eric Demey

A propos de l'événement


Où les cœurs s’éprennent
du vendredi 6 janvier 2017 au jeudi 19 janvier 2017
Théâtre de la Bastille
76 Rue de la Roquette, 75011 Paris, France

à 20h, le dimanche à 17h. Relâche le 9 et le 15 janvier. Durée : 2h. Spectacle vu à la Piscine, Théâtre Firmin-Gémier de Châtenay-Malabry.


Le 21 janvier Théâtre Jean Arp, Clamart, les 24 et 25 janvier au Théâtre de Vanves, les 11 et 12 mai au Théâtre de Lorient, le 20 mai à Dieppe, scène nationale et au festival théâtre en Mai à Dijon.


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