Danse - Critique

« On Achève bien les chevaux » de Bruno Bouché, une version spectaculaire du marathon de danse

« On Achève bien les chevaux » de Bruno Bouché, une version spectaculaire du marathon de danse - Critique sortie Danse Lyon Maison de la Danse


Maison de la Danse à Lyon / chor. Bruno Bouché, mise en scène Clément Hervieu-Léger et Daniel San Pedro

Dans le Gymnase Japy bien éclairé en milieu d’après-midi, se pressent des gars en costumes années 1930. Un événement se prépare : “ Les dossards ?’”, “Et les musiciens ?” lance le chef de l’affaire d’un ton autoritaire. Le bâtiment se prête à la perfection à l’intrigue : les marathons de danse qui ont explosé aux États-Unis après le krach boursier de 1929, où des participants sans le sou s’épuisaient dans l’espoir de gagner le prix, souvent pour un repas chaud. Inspiré de l’intrigue d’On achève bien les chevaux (1935), roman noir de l’Américain Horace McCoy, le chorégraphe du Ballet de l’Opéra du Rhin Bruno Bouché en imagine une version danse-ballet, main dans la main avec les metteurs en scène et comédiens Clément Hervieu-Léger et Daniel San Pedro. Dénonciation d’un spectacle immonde de la détresse face à la pauvreté, On achève bien les chevaux (version ballet) questionne la mise en scène des corps performatifs poussés à l’extrême.

Tragédie musicale

Quelques minutes après le début du spectacle, une foule de jeunes femmes et hommes déferlent sur le sol noir aux bandes colorées. Au son d’Around the world de Daft Punk et d’autres classiques pop (drôles d’anachronismes) joués par l’orchestre sur une estrade, les danseurs et danseuses enchaînent avec entrain une variété de danses en couple : rock acrobatique, slow, swing… Façon comédie musicale (ou plutôt tragédie musicale), les passages joués alternent avec la danse, portée par la gestuelle libre et dynamique du Ballet du Rhin. Les deux se lient avec fluidité pour servir l’intrigue, où l’on voit l’horreur se dessiner, tant par l’affaiblissement des corps poussés à bout, que dans le désespoir qui point dans les dialogues ou encore par la cruauté et les manipulations des organisateurs. Certaines scènes font écho à la version filmique de Sydney Pollack (1969), à l’instar du derby, où les concurrents joggent en se tenant les uns aux autres et s’écroulent. D’autres, comme la variation d’une ballerine, semblent évoquer un mirage. Si la dramaturgie peine à surprendre et si le jeu d’acteur verse parfois dans le pathos, cette pièce a le mérite d’interroger un goût, voire une fascination, pour le spectacle de l’effort intense et virtuose des corps, tant dans la danse que dans le sport, au prix de l’intégrité de celles et ceux qui les pratiquent.

Belinda Mathieu

A propos de l'événement


On Achève bien les chevaux
du mercredi 15 novembre 2023 au mardi 21 novembre 2023
Maison de la Danse
8 Av. Jean Mermoz, 69008 Lyon

Du 15 au 21 novembre à 20h30, les 15 et 20 à 19h30. Le 18 à 15h et 20h30. maisondeladanse.com Tél : 04 72 78 18 00. Durée : 1h25. Spectacle vu au Gymnase Japy à Paris.


Également au Théâtre de Caen les 15 et  16 février, à La Filature à Mulhouse du 7 au 10 mars, à l’Opéra de Strasbourg du 2 au 7 avril, à la Maison de la Culture d’Amiens les 11 et 12 avril.


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