C’est l’un des signes distinctifs du théâtre d’Omar Porras : la magie du théâtre, expression galvaudée, prend chez lui sa pleine mesure, grâce à sa manière impressionnante d’en conjuguer les effets. Façonné par un travail d’orfèvre, cet alliage qui unit la parole, le jeu et la technique fait naître un singulier merveilleux. Roméo et Juliette, L’Histoire du Soldat, Amour et Psyché, Ma Colombine… autant de spectacles qui nous ont enchantés. Le Conte des contes, création conçue afin de célébrer les 30 ans du Teatro Malandro, eut la malchance de naître en 2020. Il est heureux que la pièce puisse retrouver les planches et rencontrer son public. Inspiré par Le Conte des Contes (1634) du napolitain Giambattista Basile, la traversée se plaît à conjuguer une tranchante cruauté et une bienvenue réparation, à entrelacer l’horreur grandguignolesque et le merveilleux – le lapin Vélasquez en fait les frais. Tout commence dans une demeure seigneuriale nichée dans une forêt, où vit une famille dont le fils est frappé de mélancolie. Sorte de Monsieur Loyal, le docteur et raconteur d’histoire Basilio prône une inédite thérapie afin de guérir l’adolescent Prince de sa torpeur : lui faire découvrir la saveur des contes.
Les contes comme fabuleux remède à la mélancolie
Après une première histoire plutôt classique, le périple fait montre d’une force vitale étonnante qui bouscule les attentes mais aussi les identités. Les contes résonnent entre eux et font écho à leurs avatars les plus connus, que le metteur en scène et les siens revisitent avec une facétieuse liberté. Ici la Belle Endormie n’est pas éveillée par un baiser mais subit un viol avant que justice soit faite, une jeune Princesse se coupe les mains pour échapper à son père incestueux, Cendrillon se démultiplie et se transforme, à l’instar des Trois Oranges qui chantent et dansent au sein d’un cabaret flamboyant. Les comédiens et comédiennes sont excellents. Philippe Gouin est le captivant passeur d’histoire. Audrey Saad est la fille Secondine, qui endosse de multiples rôles, Simon Bonvin incarne Prince, le fils qui malgré lui est emporté dans l’aventure, Jeanne Pasquier interprète la Mère, élégante et impériale, Cyril Romoli devient un Père protéiforme, Marie-Evane Schallenberger incarne la Bonne et Melvin Coppalle le cuisinier aux énormes rôtis, souvent le couteau à la main. Le dramaturge Marco Sabbatini, la scénographe Amélie Kiritzé-Topor et le compositeur Christophe Fossemalle participent à la réussite de ce spectacle total, conte des contes qui enchante à tout âge (plutôt à partir de 12 ans).
Agnès Santi
du mardi au jeudi à 19h, vendredi à 20h, samedi et dimanche à 17h30. Puis reprise du 30 avril au 2 mai à 19h, le 3 à 20h, les 4 et 5 à 17h30. Tél : +41 (0)21 625 84 29. Durée : 1h50. www.tkm.ch
Également au Liberté, scène nationale, Toulon, les 8 et 9 février 2024. Théâtre du Passage, Neuchâtel (CH), les 16 et 16 février. Théâtre Toursky, Marseille (FR), les 23 et 24 février. Espace Malraux scène nationale Chambéry Savoie (FR), du 5 au 7 mars. Théâtre Equilibre, Fribourg (CH), le 20 mars. Le Cratère Scène nationale d'Alès (FR), les 24 et 25 avril. Théâtre Nanterre-Amandiers (FR), du 16 mai au 1er juin.
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