Théâtre - Critique

Neige

Neige - Critique sortie Théâtre


A dix-sept ans, Yuko sait déjà qu’il sera poète, contre l’avis de son père, prêtre shintoïste qui ne comprend pas l’ardeur de son engagement et le confond avec un passe-temps. Fort doué, Yuko ne tarde pas à être remarqué par le poète officiel de la cour Meiji. Ce dernier considère le jeune homme comme son évident successeur, quand le temps sera venu pour lui de briser ses pinceaux, et lui recommande de parfaire sa formation afin de parvenir à exprimer les couleurs, lui qui n’a de passion que pour le blanc et de fascination que pour la neige. Mais la route est longue jusqu’à la parfaite maîtrise de l’art et exige que soient surmontés les obstacles qui empêchent le plein épanouissement du talent. Le texte de Maxence Fermine, délicat et précis comme les haïkus que tracent ses personnages, interroge l’indispensable rencontre, à la fois douloureuse et féconde, entre la sensibilité et l’entendement, entre la chair comme matériau et sa mise en forme par le génie et suggère que celui-ci doit avoir souffert et aimé pour aboutir ses effets.
 
Un spectacle tout en synesthésies
 
Pour rompre avec sa monomanie hiémale, Yuko traverse donc le Japon pour recevoir l’enseignement de Soseki, le plus grand des artistes, auprès duquel il s’initie peu à peu à l’art des couleurs. Yuko peut alors, un fois accomplie sa quête initiatique, revenir chez son père et recommencer à écrire en tâchant désormais de saisir tout le chatoiement des choses. Mais pour que s’épanouisse complètement son talent, Yuko doit apprendre à aimer et le destin, prodigue, lui offrira la clef de l’énigme artistique à l’issue de son odyssée à travers le temps et l’espace. Stéphanie Loïk choisit la simplicité d’une grâce lente pour raconter l’histoire de Yuko et de la neige. Elle se déplace comme en glissant sur le plateau et dit d’une voix grave et pleinement timbrée les phrases économes et poétiques de Maxence Fermine. Au piano, Jacques Labarrière, qui a composé et interprète la matière musicale de ce spectacle, l’accompagne, ou plutôt dialogue avec elle, la musique et la parole se répondant et se soutenant. Entre rêve et magie, ce spectacle déploie ses couleurs avec une douce conviction et une élégante et limpide précision.
 
Catherine Robert
Neige, de Maxence Fermine ; adaptation et mise en scène de Stéphanie Loïk. Du 7 juin au 6 juillet 2008. Mardi à 20h ; mercredi et jeudi à 19h ; vendredi à 20h30 (sauf le 4 juillet à 19h) ; samedi à 18h et 20h30 et dimanche à 16h ; relâches le lundi et le 7 juin et le 5 juillet à 20h30. Théâtre Artistic Athévains ; 45, rue Richard-Lenoir, 75011 Paris. Réservations au 01 43 56 38 32.

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