« J’ai commencé la musique en voulant faire danser les gens. »
Vous êtes présent tout à la fois sur les scènes jazz et classique. Que vous apporte ce dialogue entre les répertoires ?
Michel Portal : Quand j’étais étudiant au Conservatoire de Paris, j’allais déjà jouer dans les clubs de jazz. On me qualifiait alors de « fantaisiste ». On essuie un certain nombre de critiques quand on touche un peu à tout. Mais pour moi, ça n’a fait que m’enrichir. Quand je joue du Mozart, certaines phrases me rappellent des valses-musettes de musique populaire, et parfois, dans Bach, j’imagine l’accompagnement d’une contrebasse jazz. Pour autant, même si je croise les genres, j’essaie toujours de garder le style de chacun : je ne vais pas faire du Mozart jazz. Aujourd’hui, j’apprécie que les musiciens soient plus ouverts, plus curieux et moins enfermés dans les ghettos de la musique.
Vous avez également travaillé avec de nombreux compositeurs. Comment voyez-vous la création contemporaine actuelle ?
M.P. : J’ai effectivement eu la chance de travailler avec de grands compositeurs. J’ai fait des expériences de musique aléatoire avec Stockhausen, du théâtre musical avec Kagel, de la musique électronique avec Luc Ferrari. Et avec Pierre Boulez, j’ai enregistré Domaines. Aujourd’hui, je remarque qu’il y a beaucoup de jeunes compositeurs attirés par les musiques actuelles : hip-hop, slam… Ils font des musiques que j’appellerais « métissées ». De mon côté, je me consacre maintenant davantage à la musique que j’écris moi-même.
La clarinette permet-elle plus qu’un autre instrument cet éclectisme musical ?
M.P. : La clarinette peut être extrêmement douce et très violente. On peut la malaxer et obtenir aussi bien le son d’un vieux joueur de blues que la couleur pour jouer Mozart. C’est le violon de l’harmonie. Je l’ai choisie, car je suis originaire du Pays basque. Là-bas, c’est l’instrument de la rue. J’ai commencé la musique en voulant faire danser les gens. Pour autant, tout n’est pas possible sur cet instrument. La clarinette est un peu fragile, elle ne peut pas rivaliser avec trois guitares électriques et une batterie. C’est pour cela qu’en concert de jazz, je change souvent d’instrument et je joue du saxophone (souvent le soprano, parfois l’alto) ou du bandonéon.
Propos recueillis par A. Pecqueur
Jeudi 14 août à 21h à l’Eglise de Locmaria à Quimper, avec le Quatuor Sine Nomine. Tél. 02 98 95 32 43.