L’Homme d’habitude

Si les Blérots de R.A.V.E.L. questionnent la mise en scène de leurs concerts depuis plusieurs années, il s’agit ici d’autre chose. Certes, la musique est toujours au cœur du propos, et le répertoire des Blérots est bien reconnaissable, mélange de cuivres, d’accordéon, de chant qui dénonce, d’énergie de groupe… Mais la musique n’y est pas seule maîtresse du rythme : la danse tire les ficelles de ce concert chorégraphique, les interprètes mêlent leurs disciplines en un creuset commun. Comme la danseuse africaine donne le rythme aux djembés, les danseurs guident ici les instrumentistes  par leur aura, leur rythme, leur mouvement. Le chorégraphe Bruno Pradet fusionne les pratiques, gommant la frontière entre l’orchestre et le danseur. Le corps devient rock, les basses deviennent souples, le mouvement joue, la voix danse.

Corps joueurs et instruments dansants

La rencontre entre la Compagnie Vilcanota et les Blérots de R.A.V.E.L. se fonde sur des énergies ressemblantes, une approche populaire, une vision métisse de leur art. Loin des contemporanéités institutionnelles et des propos conceptuels, leur langage artistique est celui de la ronde, de la joie du groupe, de la singularité. Onze interprètes sur scène gravitent en tribu tourbillonnante. Jeux de clair-obscur, de croisements des corps, de rythmes rock, de ballets humains : l’ordinaire social y est sublimé comme un quotidien où tout serait danse et tout serait musique, où la beauté se niche dans le moindre geste.

Vanessa Fara