Avignon - Entretien / Emmanuelle Hiron

Les Résidents

Les Résidents - Critique sortie Avignon / 2016 Avignon Avignon Off. La Manufacture


La Manufacture / de Emmanuelle Hiron / mes Nicolas Petisoff et David Gauchard

Comment est né ce projet ?

Emmanuelle Hiron : J’ai une amie d’enfance qui est gériatre. L’idée première était de réaliser un documentaire dans l’EHPAD où elle travaille avec des personnes âgées en état de démence. J’y ai tourné pendant deux ans et, comme je viens du théâtre, j’ai eu envie d’écrire à partir de tout ce que j’y avais vu et vécu.

Pourquoi ce désir ?

E.H. : Parce que ces gens-là – que je dis déments pour ne pas dire Alzheimer, terme un peu galvaudé – nous posent plein de questions. De quelle manière est-on encore en vie quand on est dément ? Comment la société les voit-elle ? Et, pour reprendre les écrits du psychologue Jean Maisondieu sur lesquels je me suis appuyé : quand les autres ne nous regardent plus, comment peut-on se regarder soi ? Dans Le Crépuscule de la Raison, Maisondieu va même jusqu’à se demander si ce n’est pas la société qui rend les vieux fous…

« Ce spectacle provoque une catharsis, soulève des passions et des débats intenses. »

Comment faire du théâtre à partir de cela ?

E.H. : De manière très simple. J’ai écrit un monologue mettant en scène le personnage créé à partir de mon amie gériatre. Je n’ai pas voulu établir un état des lieux, mais plutôt croiser le documentaire avec un discours plus subjectif, plus intime. Il y aura donc quatre séquences, deux occupées par mon documentaire, deux par ce monologue. Je n’ai pas recherché la théâtralité : mon jeu par exemple sera au plus proche d’une parole presque improvisée. Mais ce spectacle provoque une catharsis, soulève des passions et des débats intenses, j’ai pu m’en apercevoir après les représentations. Et c’est ce qui m’intéresse au théâtre.

Pourquoi de telles réactions ?

E.H. : Parce qu’on nous dit qu’on va vivre vieux mais on ne nous dit pas comment. Parce que symboliquement ces personnes sont cachées, mises au ban. Symboliquement, elles sont mortes avant l’heure. Parce qu’on est pris d’effroi à l’idée de mettre les pieds dans un établissement avec des personnes démentes. Les Résidents n’est pourtant pas un état des lieux ni un acte d’accusation. Il pose simplement la question de notre responsabilité dans le regard qu’on pose sur ces personnes, et plus largement la question de notre rapport à la mort. Avec l’amour, c’est la question éternelle du théâtre.

 

Propos recueillis par Eric Demey

A propos de l'événement


Les Résidents
du mercredi 6 juillet 2016 au dimanche 24 juillet 2016
Avignon Off. La Manufacture
2 Rue des Écoles, 84000 Avignon, France

à 12h. Relâche les 11, 17 et 18 juillet. Tél. : 04 90 85 12 71. Le 17, lecture de Le Fils, prochaine création de la compagnie.


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