Théâtre - Critique

Le Roi Lear, d’après William Shakespeare, traduction et dramaturgie Daniel Loayza, adaptation et mise en scène Georges Lavaudant

Le Roi Lear, d’après William Shakespeare, traduction et dramaturgie Daniel Loayza, adaptation et mise en scène Georges Lavaudant - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Porte Saint-Martin


d’après William Shakespeare / traduction et dramaturgie Daniel Loayza / adaptation et mise en scène Georges Lavaudant

Montée pour la première fois par le metteur en scène il y a quarante ans, la pièce avait été reprise dans la foulée sur les mêmes planches, celles du Théâtre Rio à Grenoble, et représentée, remaniée, il y a vingt-cinq ans, lors de son arrivée en tant que Directeur au Théâtre de l’Odéon. Pourquoi ce rappel historique ? Il montre plus qu’un intérêt ; il renvoie à une quête : vouloir mieux manifester encore ce qui, véritablement, se joue dans Le Roi Lear.  Au cœur de cette re-création se tient la folie, celle des hommes et d’un monde, déraisonnables, qui, sortis de leurs gonds, basculent, inévitablement, sans rédemption possible, dans la sauvagerie et le chaos. L’accent est mis sur la portée politique de cette tragédie familiale, sur le rôle du fou du Roi, celui qui tente « chaque fois que la Majesté déchoît en folie », d’éclairer Lear sur son aveuglement primordial aux conséquences atterrantes. Fait tragique inaugural, le vieux Roi rejette le don d’amour venu de sa fille, Cordélia, qui refuse de se livrer à l’exercice hypocrite de déclaration d’affection calculée à laquelle ses deux sœurs Régane et Goneril sacrifient, pour satisfaire le fol ego d’un père dont la prodigalité n’est, en son fond, que complaisance envers lui-même. Incapable jusqu’aux dernières extrémités de se regarder lui-même comme coupable, Lear est directement responsable du déchaînement de violence et du jeu de domino au déroulement implacable orchestré par l’auteur.

Une mise en scène sans concession

Portée par cette intention qui place la folie au centre du propos, la mise en scène qui pourrait souffrir d’une présence écrasante de Jacques Weber en Roi Lear ouvre la possibilité d’un juste équilibrage des rôles dont l’acteur lui-même sort grandi. Sur le plateau, Georges Lavaudant rassemble une galaxie de comédiens de haute volée dont certains qu’il connaît bien, tels Manuel Le Lièvre (le fou du Roi), François Marthouret (le Comte de Gloucester), Grace Séri et Frédéric Borie (Régane et son époux), Astrid Bas (Goneril), Babacar M’Baye Fall (Comte de Kent), et d’autres qui partagent avec lui une première collaboration, dont Bénédicte Guilbert (Cordélia),  Thomas Durand (Roi de France), Clovis Fouin-Agoutin (époux de Goneril), Laurent Papot (Edmond), Thibault Vinçon (Edgar), José-Antonio Pereira (Oswald). La scénographie pensée par le décorateur et costumier attitré du metteur en scène Jean-Pierre Vergier, d’un dénuement drastique et fait de noirceur, laisse les effets de lumière jouer à plein, et oblige les acteurs à un jeu sans fard. Néanmoins, l’émotion qui devrait nous mouvoir avec cette tragédie réputée pour être « la plus douloureuse de Shakespeare » peine parfois à nous étreindre.

Marie-Emmanuelle Dulous de Méritens

A propos de l'événement


Le Roi Lear
du mercredi 3 novembre 2021 au dimanche 28 novembre 2021
Théâtre de la Porte Saint-Martin
18, boulevard Saint-Martin, 75 010 Paris.

Théâtre de la Ville hors les murs


Les mardis, mercredis, jeudis, vendredis et samedis à 19h, les dimanches à 15h. Durée : 3h30. Tél : 01 42 08 00 32


Spectacle vu au théâtre de Saint-Quentin en Yvelines, le samedi 23 octobre 2021.


En tournée :


Décembre 2021 : Le 7 au Théâtre Edwige Feuillère, Vesoul


Octobre 2022 : du 4 au 6 au Grand Théâtre de Provence (Aix)


Novembre 2022 : du 5 au 20 TNP- Villeurbanne


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