Théâtre - Critique

La Mère

La Mère - Critique sortie Théâtre


Le fils (Clément Sibony), citant la jeune femme dont il est amoureux : « Elle disait que tu ne me laisserais pas grandir, que tu préférerais me détruire plutôt que de me laisser grandir loin de toi. Elle disais que tu m’aimais trop. » La mère (Catherine Hiegel), défendant les liens de (grande) proximité qu’elle souhaite maintenir avec son fils : « Aimer trop, ça ne veut rien dire. On ne peut pas aimer trop. On aime ou on n’aime pas. Voilà ce que je crois. Non ? Tu n’es pas d’accord ? » Le ton aurait pu être celui d’une « farce noire », entre répliques vachardes et bouffées de dépression, comme le laisse entrevoir le sous-titre que l’auteur Florian Zeller a souhaité associer à sa pièce. Mais, de farce, ici, il n’est jamais question. Le spectacle mis en scène par Marcial Di Fonzo Bo au Petit Théâtre de Paris prend en effet le parti de la sobriété, d’une forme de retenue et de circonspection. Un parti qui confère à cette Mère des teintes de drame grinçant aux dérives cauchemardesques.
 
Une figure maternelle possessive et neurasthénique
 
Un espace vide et blanc, presque clinique, meublé d’un seul fauteuil — espace qui ouvre, par intermittences, sur une partie de l’arrière scène apparaissant en transparence — sert de cadre à cette pièce courte jouant et rejouant les humeurs d’une mère de famille en mal d’amour et de compagnie. Engendrant tour à tour des relations de tension puis d’apaisement, de discorde puis d’apparente cordialité, les différentes scènes de La Mère se succèdent et s’opposent, suivant un procédé de répétition qui finit par lasser. Tout, pourtant, semble devoir plaider en faveur de cette représentation d’impeccable tenue. Olivia Bonamy, Jean-Yves Chatelais, Catherine Hiegel et Clément Sibony qui tiennent le cap de l’intériorité et de la précision. La mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo, qui crée un cadre épuré et exigeant. La pièce de Florian Zeller, enfin, qui fait preuve d’une incontestable maîtrise d’écriture. Néanmoins, c’est sans doute elle qui porte la responsabilité de l’atonie dans laquelle sombre peu à peu le spectacle. Car, en dépit de ses qualités, l’écriture de l’auteur ne donne naissance à aucune réelle forme de nécessité. Confinant à une sorte d’exercice de style, l’expression des névroses de cette famille en crise donne corps à une partition, certes élégante, mais sans âme.
 
Manuel Piolat Soleymat

La Mère, farce noire de Florian Zeller ; mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo. A partir du 25 septembre 2010. Du mardi au samedi à 21h. Matinées le samedi à 18h et le dimanche à 16h. Petit Théâtre de Paris, 15, rue Blanche, 75009 Paris. Tél : 01 42 80 01 81. Durée de la représentation 1h15.

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