Théâtre - Critique

Hunter

Hunter - Critique sortie Théâtre Paris Chaillot - Théâtre national de la danse


Chaillot - Théâtre National de la Danse / Texte et conception Marc Lainé

La trentaine distinguée, apparemment bien sous tous rapports, Claire et David (Bénédicte Cerutti et David Migeot) vivent dans une banlieue pavillonnaire quelconque. De celles où des « maisons absolument identiques s’alignent à perte de vue » et semblent inciter à un quotidien rationnel. Sans fantaisie ni excès. Mais dans Hunter comme dans tout film d’horreur, le calme n’existe que pour être rompu. L’existence du couple vire en effet au cauchemar après l’intrusion dans sa propriété d’Irina (excellente Marie-Sophie Ferdane), une jeune fille aussi belle qu’étrange. Une sorte de loup-garou, apprend-on plus tard. Après Vanishing Point (2015), où il investissait les codes du road movie, Marc Lainé poursuit donc dans cette pièce ses recherches autour du cinéma de genre. Non dans le but de rivaliser d’illusion avec le septième art, au contraire : mêlant théâtre, cinéma et musique en live, le metteur en scène cherche à montrer les mécanismes de fabrication des images. Celles de la métamorphose notamment, réalisée devant le spectateur avec maquillage, prothèses et autres « trucs » nécessaires à la fabrication d’un monstre de cinéma. Comme Cyril Teste avec ses performances filmiques et de nombreux autres artistes versés dans les formes hybrides, Marc Lainé sort donc les griffes contre le spectaculaire. Mais plutôt que des griffes de loup, ce sont celles d’un chat. Très immersif malgré des efforts de distanciation, Hunter peine en effet à traduire tous les questionnements de son auteur.

Vers une métaphysique du monstre

Filmées en direct et retransmises sur un grand écran installé au-dessus du plateau, la transformation d’Irina et la descente aux enfers de Claire et David captivent d’autant plus qu’elles sont accompagnées de l’électro de Gabriel Legeleux (alias Superpoze), qui incarne aussi le frère de la créature. La scène a beau ne pas dire tout à fait la même chose que la toile, ces deux composantes du spectacle ont tendance à se fondre en un tout séduisant. Qualité difficilement compatible avec la démarche critique, mais aussi métaphysique, vers laquelle tend Marc Lainé. Derrière son monstre et son récit bien rythmé, Hunter cache en effet une réflexion sur le désir. Sur sa proximité avec le cannibalisme et son étouffement par les conventions sociales. Mordu – au sens propre comme au figuré – par la femme loup-garou, David développe une telle attirance pour celle-ci que ses habitudes conjugales en sont bouleversées. Faute d’être disséqué avec beaucoup plus de précision que dans un film d’horreur classique, ce trouble n’offre hélas pas la distance qu’on aurait pu souhaiter avec le genre en question. Les promesses de Hunter étaient grandes ; elles ne sont pour le moment qu’à moitié tenues.

Anaïs Heluin

A propos de l'événement


Hunter
du mercredi 7 mars 2018 au vendredi 16 mars 2018
Chaillot - Théâtre national de la danse
place du Trocadéro et du 11 novembre, 75016 Paris, France

À 19h45 le mardi, mercredi, vendredi et samedi, à 20h30 le jeudi et à 15h30 les dimanches. Relâche le lundi. Tel : 01 53 65 30 00. www.theatre-chaillot.fr. Également à l’Avant-Seine / Théâtre de Colombes le 30 mars, au Théâtre Dijon-Bourgogne du 3 au 6 avril, au Théâtre de Châtillon le 13 avril, à la Comédie de Saint-Étienne du 24 au 26 avril. Au Quartz, Scène Nationale de Brest les 23 et 24 mai et aux Subsistances à Lyon du 1er au 3 juin.


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