Théâtre - Critique

Erreurs salvatrices, de Wilfried Wendling avec Denis Lavant

Erreurs salvatrices, de Wilfried Wendling avec Denis Lavant - Critique sortie Théâtre 75014 Paris Théâtre de la Cité Internationale


THÉÂTRE MUSICAL - CRITIQUE

Chaque mot, dans les textes d’Heiner Müller, devient théâtre, suscite une représentation. Loin d’émousser leur force, la répétition de ces mots, dont ne se prive jamais l’auteur, leur réécoute ouvrent des horizons nouveaux, projettent des images toujours plus puissantes. Il y a là, Wilfried Wendling l’a bien compris, matière à mettre en musique. L’instrument premier d’Erreurs salvatrices est l’incarnation des mots d’Heiner Müller par la voix de Denis Lavant. Une partie importante de l’œuvre consiste ainsi en une lecture des textes de l’écrivain par le comédien. Une lecture engagée, habitée, hallucinée et qui rapidement se dédouble. Par le corps tout d’abord, qui se tient toujours prêt à surgir, derrière les mots. Par l’image ensuite : aux extrémités de la salle, des écrans renvoient l’image de l’acteur-narrateur, assis derrière une machine à écrire, filmé en caméra fixe sous différents angles. Est-ce le comédien ou son image qui parle ? A force de nous faire prendre les spectres pour les vivants (Hamlet d’après Shakespeare en 2018 avec Serge Merlin), de faire se confondre la réalité et l’illusion (Fake d’après Ibsen en 2020 avec Abbi Patrix), Wilfried Wendling incite à douter des apparences ; n’est-ce pas plutôt nous-mêmes qui projetons ce que l’on entend ?

Dédoublement du corps

Dédoublement des corps également. Sur scène, le circassien Alvaro Valdès Soto, qui remplace pour ces représentations Cécile Mont-Reynaud, s’empare par moments de la structure de cordes – la fileuse – au centre du plateau, la traverse, l’escalade, s’en échappe, y revient. Il est un second corps : parfois l’ombre de l’un, parfois son autre, parfois un autre état du corps. Ce jeu de double et de doublure se reflète dans le son qui afflue durant la cinquantaine de minutes que dure chaque représentation. Comme le choix des textes, la musique est en effet très différente d’un « set » à l’autre et convoque – ou non – telle ou telle machine musicale animée en direct par le compositeur et ses interprètes (Grégory Joubert, Thomas Mirgaine), assumant sa force bruitiste ou construisant comme une ritournelle. La voix et le corps de Denis Lavant sont le premier instrument de ces Erreurs salvatrices, disionsnous. Wilfried Wendling tourne longtemps autour : la voix est cri avant d’être mot, le corps est chute avant d’être posture. C’est au fond ce que l’on pourrait appeler une musique concrète vocale et corporelle.

Jean-Guillaume Lebrun

A propos de l'événement


Erreurs Salvatrices
du vendredi 10 décembre 2021 au samedi 18 décembre 2021
Théâtre de la Cité Internationale
17 boulevard Jourdan, 75014 Paris.

19h30 (relâche mercredi et dimanche). Tél. : 01 43 13 50 50.


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