Danse - Critique

Elles disent par Nach : quatre danseuses organiquement unies

Elles disent par Nach : quatre danseuses organiquement unies - Critique sortie Danse Avignon Théâtre Benoît XII


Les Hivernales CDCN / Chorégraphie Nach

C’est fondamentalement ancrée dans le krump que Nach a envisagé cette création. Elle l’ouvre d’ailleurs par du gros son, avec quatre danseuses qui évoluent comme elles le feraient dans leur « family », tout à leur gestuelle, en force, en rageuses invectives comme en complicité joyeuse. La singularité du projet de Nach réside dans son désir de mêler intimement la danse à la voix. Le titre, Elles disent, sous-entend l’importance de la notion de prise de parole ; et l’on connaît chez la chorégraphe sa tendance à la mise à nu, à l’exposition, à l’affirmation pleine de sens et à l’engagement du côté du féminin. Une ambigüité réside cependant dans son projet. Il ressort de la pièce que l’enjeu ne se place pas du côté de ce qu’elles disent, mais davantage dans la façon dont elles disent. Quand la musique d’ouverture s’arrête, reste le son de leurs corps. Un moment précieux pour poser les choses, entendre à quel point la spécificité de leur danse engendre, dans leurs souffles, dans leurs râles, dans l’attaque de leurs mouvements, dans leurs encouragements réciproques, dans leurs apostrophes, une musicalité étonnante, habituellement couverte par l’environnement sonore. Des mots commencent à fuser, qui sont ceux de l’interprète en train de danser, joliment à l’écoute de l’espace, de ses trajectoires, de sa relation à l’autre.

Le sens de la parole évacué

Il existe donc de très beaux moments dans cette pièce, qui racontent le lien organique entre le souffle, la voix et le geste dansé. Beaucoup tiennent de la belle qualité de présence des interprètes, avec notamment une Mulunesh très taquine, ou une Sophie Palmer qui réussit le dialogue entre le flamenco et le krump en partageant une même puissance – solaire pour l’un, volcanique pour l’autre. Nach emporte également sa « meute » vers des personnages en appuyant parfois sur le côté burlesque. Un contraste étonnant compte tenu de ses précédents solos, mais qui rejoint un des aspects du krump, le « clowning », montrant volontiers que cette danse ne se résume pas à sa violence contenue. Dommage qu’il faille passer par de longs moments où la parole s’égrène dans des exercices de style alphabétiques et syllabiques dont on cherche en vain le sens. Car ces prises de paroles ne font pas récit. Reste alors l’impression d’une communauté de personnalités organiquement unies, qui ne boudent pas leur plaisir d’être ensemble, comme en témoigne l’ultime scène, en pied de nez à leur liberté de crier.

Nathalie Yokel

A propos de l'événement


Elles disent
du jeudi 9 février 2023 au jeudi 9 février 2023
Théâtre Benoît XII
12 rue des teinturiers, 84000 Avignon

Le 9 février 2023. Tél. : 04 90 11 46 45.


Tournée : les 2 et 3 mars 2023, Théâtre de la Croix Rousse - Festival Sens dessus dessous Maison de la Danse – Lyon,


Les 23 et 24 mars 2023, Halles de Schaerbeek – Belgique,


Du 29 au 31 mars 2023 à La Villette – Paris


Les 12 et 13 avril 2023 au Lieu Unique – Nantes.


Spectacle vu à l’Atelier de Paris – CDCN


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