Ce monde est plus que sombre. Il est crépusculaire. Enigmatique et ténébreux. Un chien menaçant apparaît dans une obscurité dense. Il se met à grogner, à hurler vers une lune que l’on ne voit pas. Puis, un homme vêtu de noir, au teint pâle, à la chevelure de jais, transperce la nébulosité du plateau. Il nous fait face dans une droiture figée, toute dramatique et solennelle, prononce quelques phrases sur le visible et l’invisible, les frontières de l’insondable (ces propos, en anglais, sont surtitrés en français). Subitement, il s’esquive. S’évapore sur un claquement de doigts. Au moment même où s’élève dans les airs un vol de chauves-souris. Trois femmes à la ressemblance troublante errent à travers des jeux de miroirs. Elles prennent des airs d’introspection. Une autre protagoniste, apathique, est étendue sur un lit. Elle n’a pu résister aux assauts et aux morsures d’un vampire que l’on devine être le Comte Dracula… De l’histoire du Seigneur des Carpates, la dernière création de la Compagnie Plexus Polaire ne retient que quelques motifs, à peine quelques scènes. Dans un univers faisant se côtoyer comédiens, marionnettes à taille humaine, vidéos, musiques et lumières, cette version théâtrale de Dracula (pour tous publics à partir de 14 ans) réduit à presque rien les lignes narratives d’une fable qui échappe.
Les marionnettes à taille humaine de la Compagnie Plexus Polaire
On attendait beaucoup du spectacle conçu par la directrice artistique de la Compagnie Plexus Polaire, l’une des figures montantes des arts de la marionnette. On aurait aimé, comme sa note d’intentions le laisse envisager, qu’il nous transporte vers des territoires vastes et inspirants. Des ailleurs intrigants, féconds d’un tas d’évocations sensorielles, d’impressions secrètes, de perspectives fantastiques, existentielles. On espérait qu’il réinvente à sa façon les personnages et les thèmes du roman publié par Bram Stoker en 1897, qu’il ouvre des portes à notre imaginaire, à nos peurs, aux saisissements qu’engendrent souvent sur scène la présence et la manipulation de marionnettes. La réalité du plateau, lors de la première représentation au Théâtre des Quartiers d’Ivry, était tout autre. La proposition d’Yngvild Aspeli offre pourtant de jolies images, quelques beaux moments de chorégraphie et de mise en jeu marionnettiques. Mais l’ensemble de la représentation souffre d’une trame trop répétitive, trop exiguë. Au final, ce Dracula d’à peine une heure, ne paraissant être qu’une étape de travail, se perd dans un goût d’inachevé.
Manuel Piolat Soleymat
Le Lanterneau. Du 2 au 12 décembre 2021. Du mardi au vendredi à 19h30, le samedi à 17h, le dimanche à 16h. Durée de la représentation : 1h. Tél. : 01 43 90 11 11. www.theatre-quartiers-ivry.com
Egalement les 19 et 20 janvier 2022 au GRRRANIT - Scène nationale de Belfort, le 30 janvier à Figurfestspillene i Tonsberg (Norvège), le 3 février à Heilbronn (Allemagne), le 5 février à Stuttgart (Allemagne).
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