Dissection d’une chute de neige, ou La Reine qui voulut être Roi

Dotée par son père du titre de « roi de Suède » afin qu’elle puisse lui succéder sur le trône, Christine de Suède ne fut jamais reine et pas tout à fait femme… Epaule déformée par les nombreuses chutes dues à une enfance sans lisière et une mère inattentive, pipe au bec, toquée de philosophie au point de tuer Descartes à force de lui imposer des conversations matinales dans l’enfer de l’hiver suédois, amoureuse des arts et peu soucieuse de reproduire la lignée royale : Christine avait tout de l’enflure et de la folie des héros shakespeariens. Orgueilleuse et brillante, excentrique et provocatrice, laide mais séduisante, la Sémiramis suédoise a de quoi inspirer les dramaturges !

Une destinée hors cadres

Yumi Fujimori, François Kergourlay, Harald Leander et Marcela Obregon interprètent la vie et les combats de Christine dans une scénographie, imaginée par Marta Cicionesi, qui multiplie les cadres dont la fille-roi ne cesse de sortir, renforçant le caractère transgressif de son personnage. L’espace scénique, sans cesse réinventé, permet aux quatre comédiens de camper les huit rôles de la pièce, en dévoilant systématiquement la théâtralité des artifices, qui atteint son point d’orgue au moment où sont portés les masques d’Etienne Champion. A travers une destinée hors normes, l’équipe artistique, dirigée par Mariana Araoz, dissèque nos constructions mentales en un bel éloge de la liberté qui « se déploie dans un univers baroque, grotesque, onirique et trash ».

Catherine Robert