Théâtre - Entretien

Denis Podalydès

Denis Podalydès - Critique sortie Théâtre


« Monsieur Jourdain est un rêveur magnifique et extravagant, bilieux en diable aussi. »

Pourquoi avez-vous choisi de mettre en scène la version « comédie-ballet » du Bourgeois Gentilhomme et non la version théâtrale ?

Denis Podalydès : C’est précisément cette forme étonnante, la comédie-ballet, qui m’a toujours intrigué. La pièce réunit, oppose et célèbre les arts. Sans la musique, la danse, le chant, portés à un niveau d’excellence, la pièce perd de sa saveur et de sa poésie. Monsieur Jourdain est à la fois la dupe et le héros de cette grande allégorie moliéresque.

Quel regard portez-vous sur ce personnage ?

D. P. : Je l’aime profondément. Son ignorance et sa naïveté sont aussi vastes que son désir d’apprendre, de connaître ce monde merveilleux et inaccessible – monde qu’il enveloppe sous l’expression magique de « gens de qualité ». Son désir n’est pas utilitariste, même s’il a en tête la marquise Dorimène. Monsieur Jourdain est un rêveur magnifique et extravagant, bilieux en diable aussi, comme le sont tous les grands caractères de Molière.

Quels sont les axes structurants de votre mise en scène ?

D. P. : Nous sommes dans la draperie de la famille Jourdain, les tissus joueront un grand rôle. Pour le jeu, nous cherchons à trouver « la franchise et l’allégresse » dont parlait Jacques Copeau dans son livre Molière. Je voudrais aussi que l’on puisse, à travers Jourdain, dans les yeux mêmes de Pascal Rénéric (ndlr, comédien qui interprète le personnage), aimer tous les arts convoqués dans ce lieu hétéroclite, toucher des yeux la beauté dans ses manifestations diverses. Je voudrais que l’émerveillement de Jourdain puisse être aussi le nôtre…

Le rapport que vous entretenez au plateau en tant que metteur en scène est-il différent de celui qui vous lie à lui en tant que comédien ? 

D. P. : Non, il n’y pas vraiment de différence. Je dirige en tant qu’acteur, je pense, à travers des intuitions de jeu qui seraient les miennes si j’étais sur le plateau. Mais néanmoins, j’essaie de ne pas mâcher le travail et le texte à la place des acteurs. J’essaie d’objectiver mes intuitions, de les formuler avant d’éventuellement les indiquer par et dans le jeu. Je crois aussi qu’en tant qu’acteur, je répète avec une conscience de metteur en scène. Très instinctivement, inconsciemment, cela se fait malgré moi. J’aime jouer en ayant conscience de tout ce qui se passe sur le plateau, à l’intérieur d’une idée qui tâche de dépasser la seule connaissance ou conscience de mon personnage. Ce qui ne veut absolument pas dire que j’interfère dans le travail du metteur en scène. Bien au contraire, j’essaie de parfaitement comprendre et lire ses intuitions, de les suivre et de les incarner.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat


* Christophe Coin dirige, pour l’occasion, les solistes de l’Ensemble baroque de Limoges.

Du 19 juin au 21 juillet 2012. Du mardi au samedi à 21h, matinées les samedis à 15h30, relâches les dimanches, lundis et le samedi 14 juillet. Théâtre des Bouffes du Nord, 37 bis, boulevard de la Chapelle, 75010 Paris. Tél. : 01 46 07 34 50. www.bouffesdunord.com.

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