“À quel temps tu vas l’écrire, ton histoire ?”. C’est la demande adressée au narrateur par le premier personnage qui apparaît dans son récit. La réalité a percuté cet auteur : impossible de continuer à écrire des fictions légères. C’est tout l’enjeu, à la fois de ce personnage et de Stéphane Bonnard, l’auteur de Continent : face aux catastrophes imminentes, que peut-on encore écrire ? C’est toute la question de ce que peut le théâtre qui est reposée ici. Et qui reçoit une réponse, nécessairement subjective, mais qui ne manque ni d’intelligence ni de sensibilité : il faut témoigner à la fois de ce qui nous menace et de ce qui s’invente, concrètement, pour nous sauver. Non pas parler de dogmes, et de systèmes, mais témoigner directement, à la première personne, des laboratoires dans lesquels un futur possible se bricole, recherches menées non par des scientifiques mais par des gens ordinaires déterminés à survivre.
Témoigner, poétiser, dénoncer
Le récit de Continent est donc celui d’un auteur bousculé par une vision apocalyptique qui le hante. Le spectacle, qui commence de manière légère, façon stand-up, spectateurs initialement disposés en frontal, mute et évolue : l’ambiance change, le public recompose son rapport à l’espace à l’invite du comédien, le témoignage commence. Les personnages introduits sont tragiquement humains, forts et fragiles à la fois ; le récit ramasse des fragments d’une vie fertile de possibles qui s’écrit à la marge, une vie menacée par l’autorité qui veut l’ordre et non l’invention, menacée par la violence aussi. Au soutien de cet homme qui raconte, seul, planté derrière son micro, deux complices interviennent, l’un qui produit une musique électronique et pourtant organique avec ses synthétiseurs analogiques, l’autre qui manœuvre une grue sur laquelle est monté un projecteur capable de toutes les ambiances, lumière crue aveuglante ou lumière agonisante de fin du monde. Le texte est donné droit dans les yeux, et flirte en permanence avec le slam, sur le fil. Un spectacle comme un road-trip mental, propre à ressusciter les imaginaires, au bord de la fin de l’histoire.
Mathieu Dochtermann
à 22h, relâche le 16 juillet. Tél. : 04 32 75 15 95.
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