Théâtre - Entretien

Cherchez la faute !

Cherchez la faute ! - Critique sortie Théâtre Paris theatre de l'aquarium


Théâtre de l’Aquarium / d’après Marie Balmary / adaptation et mes François Rancillac

Cherchez La Faute s’inspire d’un essai de Marie Balmary*. De quelle façon cet ouvrage éclaire-t-il la Genèse ?

François Rancillac : Psychanalyste, Marie Balmary est obsédée par la question du sujet : quand est-ce qu’un être se met à parler en propre, délié de tout ce qui parlait jusqu’alors en lui, pour lui ? Il n’y a guère que les grands mythes fondateurs pour nous renseigner sur cette apparition de l’homme, doué de conscience et capable de « dire je ». La Genèse en est un, que Marie Balmary lit sans aucun présupposé. En exégète, elle retourne au texte original (en hébreu ancien) qu’elle interroge au plus près de chaque mot, en toute rigueur mais aussi en toute liberté.

Comment vous est venue l’idée de créer un spectacle à partir de ces réflexions ?

F. R. : En 2001, pour répondre à une commande du Théâtre d’Epernay. On m’a parlé de La divine origine: je suis tombé de ma chaise en le lisant ! Le spectacle a trouvé sa forme définitive en 2003 et a été joué jusqu’en 2008. Dans le contexte actuel de retour des intégrismes de tout poil et de dévoiement de la laïcité (je créerai sur ce sujet, la saison prochaine, un texte commandé à Mariette Navarro), j’ai voulu reprendre ce spectacle. Avec un sentiment d’urgence encore plus grand qu’il y a seize ans.

« Lire, c’est interpréter, c’est ouvrir les sens infinis de ces textes transmis du fond des âges. »

Quelle place occupent les comédiens Danielle Chinsky, Daniel Kenigsberg et Frédéric Révérend au sein de votre mise en scène ?

F. R. : Pour lire la Bible, Marie Balmary prône la lecture à plusieurs. Polyphonique et contradictoire, elle permet de déjouer les pré-interprétations qu’on plaque plus ou moins inconsciemment sur ce texte. J’ai donc imaginé une assemblée de personnes qui lisent ensemble le récit de la Genèse en acceptant d’oublier ce qu’elles croient déjà en savoir. D’où un dispositif très simple : un grand rectangle de tables, où sont assises une trentaine de personnes, entourées d’un deuxième cercle d’une autre trentaine de spectateurs. Parmi eux, « trois exégètes » animent la lecture, modérée par « un candide » (joué par moi-même, en alternance avec Fatima Souahlia-Manet). Chaque spectateur a le texte sous les yeux. C’est de cette communauté éphémère de lecteurs-enquêteurs qu’une interprétation semble peu à peu surgir…

L’idée est donc que chacun se sente accueilli dans votre travail ?

F. R. : Oui, chacun, quelles que soient ses connaissances et ses convictions. En cela, ce spectacle met en acte une « laïcité de conscience ». Il s’agit de rappeler qu’il est de notre responsabilité citoyenne de nous ré-accaparer ces écrits fondateurs de notre humanité, de ne pas les laisser entre les seules mains des intégristes. Lire, c’est interpréter, c’est ouvrir les sens infinis de ces textes transmis du fond des âges qui nous rappellent que notre humanité est infiniment plus diverse, plus riche, plus inventive que ce que d’aucuns voudraient nous faire accroire.

* La Divine Origine / Dieu n’a pas créé l’homme, Editions Grasset.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement


Cherchez la faute !
du mardi 12 décembre 2017 au dimanche 21 janvier 2018
theatre de l'aquarium
2 Route du Champ de Manoeuvre, 75012 Paris, France

Du 12 au 23 décembre 2017 et du 9 au 21 janvier 2018. Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h. Tél. : 01 43 74 99 61. www.theatredelaquarium.com


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