Avignon - Entretien

Ce qui demeure

Ce qui demeure - Critique sortie Avignon / 2018 Avignon Avignon Off. La Manufacture


La Manufacture / texte et mes Elise Chatauret

« Comprendre d’autres existences que la mienne. »

Quelle est votre méthode de travail ?

Elise Chatauret : Mes pièces partent du réel, des événements qui s’y produisent, mais surtout des histoires qui s’y racontent. Ma méthode de travail est empirique, née du désir de porter à la scène les gens et leurs paroles. Au fil des spectacles s’est inventé pour moi un protocole de travail. Je choisis un sujet, j’enquête et je mène des entretiens. Mes spectacles s’élaborent ensuite à partir de toute la matière documentaire recueillie. Puis l’écriture s’émancipe peu à peu pour questionner le potentiel théâtral des matériaux et œuvrer à une forme de porosité entre document et fiction. Les entretiens bruts, eux, ne disparaissent jamais, ils refont surface en périphérie, ressurgissent et nourrissent une recherche active sur le récit et la parole rapportée.

Pourquoi avoir choisi de travailler avec une très vieille personne ?

E. C. : Interroger et questionner ce qu’est la vie d’une femme à 93 ans me permet de creuser une réalité que j’ignore et de comprendre d’autres existences que la mienne. On parle très peu de ce que c’est que vieillir, il y a comme un angle mort dans nos sociétés sur ce sujet, et comme toutes les choses dont on ne sait rien, on imagine que c’est très grave. Or, c’est un moment de passage qui contient aussi sa joie et mérite absolument d’être vécu. C’est aussi cela que raconte le spectacle. J’ai découvert en écrivant le texte que la question centrale des entretiens était peut-être celle-ci : qu’est-ce qui demeure d’une vie, qu’est-ce qui reste ? Je pourrais dire que le spectacle tout entier est une réponse à cette question. En l’occurrence, pour mon amie, ce sont des choses apparemment anecdotiques tout comme de grands événements : la sensation de la robe de sa grand-mère contre sa peau, quelques secondes de bonheur un soir d’été à côté de ses enfants endormis, mais aussi le cycle des guerres…

Comment s’agencent, à la fin, mémoire individuelle et mémoire collective ?

E. C. : Le spectacle mêle la grande Histoire et les souvenirs biographiques les plus infimes, sans hiérarchie et sans logique, par touches et impressions. Cette dramaturgie lacunaire permet à chaque spectateur de créer des liens avec sa propre histoire. La mémoire est monteuse par excellence, elle réinvente tout et creuse des failles dans le continuum de l’histoire, comme le théâtre, où l’imaginaire et la réalité cohabitent de la façon la plus libre qui soit.

 

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement


Ce qui demeure
du vendredi 6 juillet 2018 au dimanche 29 juillet 2018
Avignon Off. La Manufacture
2, rue des Ecoles, Avignon

à 10h05 ; relâche les 12 et 19 juillet. Tél. : 04 90 85 12 71.


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