Théâtre - Entretien

Benjamin Lazar, Heptaméron, récits de la chambre obscure

Benjamin Lazar, Heptaméron, récits de la chambre obscure - Critique sortie Théâtre Amiens Maison de la Culture d’Amiens


Maison de la Culture d’Amiens / d’après L’Heptaméron de Marguerite de Navarre et les madrigaux de Luca Marenzio, Claudio Monteverdi et Carlo Gesualdo / mes Benjamin Lazar / direction et création musicale Geoffroy Jourdain

« Une recherche d’harmonie entre les êtres, même éphémère, le temps d’un madrigal. »

 Pourquoi choisir de travailler autour de cette œuvre si peu connue ?

Benjamin Lazar : Je trouve intéressant, comme je l’avais fait avec le vrai Cyrano de Bergerac, de faire découvrir des écritures peu lues. L’Heptaméron est une collection d’histoires racontées par un groupe de narrateurs qui s’inventent ce passe-temps comme exécutoire à une longue attente. Marguerite s’inspire du Décaméron de Boccace mais elle ajoute l’idée que les histoires doivent être vraies. Cela lui permet de donner à l’imaginaire une valeur de vérité. A partir de cette situation, nous jouons sur la superposition des temps, nous sommes entre les XVIème et XXIème siècles, dans cette zone entre plusieurs lieux et plusieurs temps que permet d’habiter le théâtre.

Comment liez-vous le texte et la musique ?

B.L. : Avec Geoffroy Jourdain, nous explorons à chaque spectacle des manières différentes de mêler musique et théâtre. Ici le principe de narrations successives nous permet de basculer du récit au théâtre de manière imprévue et renouvelée. On cherche ce même imprévu dans le glissement de la parole parlée au chant, et ce, d’une manière plus originale qu’à l’opéra. Le madrigal est l’étape juste avant l’invention de l’opéra : ce ne sont pas des personnages qui parlent, mais des poèmes, chantés à plusieurs voix. Le madrigal explore la dimension magique de la poésie : chez Monteverdi par exemple, la musique devient la nuit ou le souffle du vent. Le spectacle est comme un damier de musiques et d’histoires qui se répondent. La ligne des madrigaux, celle de L’Heptaméron et celle des commentaires forment une constellation où le spectateur peut repérer des répétitions, menant une sorte d’enquête à travers les motifs de cette collection faussement disparate.

Quel est le thème du texte et donc du spectacle ?

B.L. : Le texte parle de l’amour, de sa répétition et de ses variations, souvent de manière assez sombre. Marguerite de Navarre a le goût du fait divers. Les débats qui suivent les histoires révèlent le jeu de cache-cache entre l’amour dont on parle en société et la manière dont il se vit réellement. La passion amoureuse est décrite comme un flux qui n’est ni choisi ni maîtrisable. Marguerite la regarde avec humour, et parfois avec attendrissement. C’est aussi, à travers les lignes, un texte magnifique sur la solitude et les tentatives pour en sortir. Les madrigaux, eux, sont traversés par un thème général, qui est l’absence de l’objet amoureux dans le poème. Dans ce jeu de miroirs autour d’un centre vide, se lit une question existentielle, parfois inquiète, mais aussi une recherche d’harmonie entre les êtres, même éphémère, le temps d’un madrigal.

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement


Benjamin Lazar, Heptaméron, récits de la chambre obscure
du lundi 14 janvier 2019 au vendredi 18 janvier 2019
Maison de la Culture d’Amiens
2, place Léon-Gontier, 80000 Amiens

Lundi, mercredi et vendredi à 20h30 ; mardi et jeudi à 19h30. Tél. : 03 22 97 79 77. Reprise au Théâtre des Bouffes du Nord du 1er au 23 février puis en tournée jusqu’en avril.


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