Jazz / Musiques - Gros Plan

Belem & The MeKanics

Belem & The MeKanics - Critique sortie Jazz / Musiques Paris Centre Wallonie-Bruxelles


CENTRE WALLONIE BRUXELLES / SPECTACLE MUSICAL

Par un paradoxe saisissant, ce projet musical s’impose d’abord par sa dimension visuelle. Un spectacle étrange s’offre d’emblée au spectateur : sur scène, disposé en arc de cercle, se découvre un paysage vallonné d’instruments jamais vus ni entendus, dont on ne sait pas si ils sont futuristes ou sortis d’un musée de l’étrange. Au centre, plus familiers, une énorme batterie rock et un accordéon posé sur un socle à la manière d’une sculpture, mais dont on ne tardera pas à découvrir qu’ils joueront sans… batteur ni accordéoniste ! C’est que nous sommes face à un insensé grand orchestre mécanique de quinze éléments (dont une majorité d’orgues), né dans les laboratoires de la société Decap en Belgique, de l’imagination folle du compositeur Walter Hus, musicien-poète inclassable, fils de Iannis Xenakis autant que de Brian Eno et de Pierre Henry. D’abord comme un peu perdus au milieu de ce décor, seuls éléments humains d’un voyage musical non cartographié, les musiciens du duo Belem formé par Didier Laloy (accordéon diatonique) et Kathy Adam (violoncelle) prennent petit à petit possession du plateau… Ces deux complices de 25 ans qui remplissent les plus grandes salles en Belgique ont signé leur premier disque en duo il y a 4 ans. Le public français va les découvrir à la faveur de ce nouveau projet scénique et discographique intitulé « Belem & The MeKanics ». « Belem ce n’est pas du tango mais cela en a la sensualité et l’énergie… On a beaucoup voyagé dans les musiques du monde mais on n’est dans aucun folklore typique » précise Didier Laloy, musicien feu follet qui occupe l’espace scénique du concert avec une belle générosité.

Voyage dans un ailleurs sonore et visuel

Ce répertoire s’est construit dans la rencontre entre les climats folk du duo et la fascination du compositeur Walter Hus pour les instruments mécaniques. « Pour moi ce projet est très belge, il y a en Flandre et en Hollande, beaucoup plus qu’en Wallonie ou en France, une tradition des instruments mécaniques, avec ces limonaires – une version géante de l’orgue de barbarie – que l’on trouvait dans les cafés. En pensant à cet instrument je revois les plages ostendaises, je pense à la chanson d’Arno « Les filles du bord de mer »… » confie Didier Laloy. Mais ce spectacle, vu en création mondiale à Bruxelles à l’automne dernier, emmène beaucoup plus loin qu’une exploration nostalgique ou l’évocation d’une couleur locale. Il projette l’auditeur dans un ailleurs sonore aux climats très cinématographiques, à la croisée de deux mondes, les inspirations heureuses de Didier Laloy et les obsessions dantesques de Walter Hus qui cosignent tous les morceaux. « Je suis allé très loin dans l’exploration de ces instruments. Pendant plusieurs années ils ont été ma priorité. Mais ce n’était pas par volonté. Je suivais mon désir, mon plaisir, c’est tout. J’ai vécu comme un coup de foudre pour ces instruments. Je ne peux pas dire combien d’heures j’ai passé dans mon studio en leur présence. Pendant, ce travail j’ai eu des moments d’éblouissements. J’ai voulu aller à fond dans cette direction. J’essaye souvent de faire des projets impossibles mais pour ce projet spécifique avec Belem, je suis rentré dans un projet plus rationnel. Un monde de gentillesse. Didier est un musicien très inspiré. Il a une richesse d’idées incroyable. La musique coule de source chez lui et ses mélodies ne sont jamais ordinaires » explique Walter Hus. « Ces instruments sont fascinants, confirme Didier Laloy qui aime à se définir, avec modestie, comme un « raconteur d’histoires » davantage que comme un compositeur. « Si l’on ne considère que le haut de l’iceberg, ce que l’on voit ce sont des tuyaux de bois, mais tout ce qui est « en dessous », caché, ce sont des kilomètres de câbles, de l’informatique hyper sophistiquée, des impulsions midi. C’est ultra-sophistiqué mais on ne le voit pas ! C’est ça que je trouve magique… » conclut l’accordéoniste. Leur voyage singulier explore tout un monde lointain de folklores imaginaires – du côté de Fellini et de Tim Burton -, comme hantés par les émotions premières de l’enfance.

Jean-Luc Caradec

A propos de l'événement


Belem & The MeKanics
du mercredi 31 janvier 2018 au vendredi 2 février 2018
Centre Wallonie-Bruxelles
129 Rue Saint-Martin, 75004 Paris, France

à 20 h. Tél. 01 53 01 96 96. Places : 5 à 10 €. Spectacle vu à Bruxelles en décembre 2017.


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