Théâtre - Critique

A contre-voix

A contre-voix - Critique sortie Théâtre Paris La Reine Blanche


La Reine Blanche / d’Elisabeth Bouchaud / mes Nathalie Martinez

Il flotte comme un parfum des romans de Stefan Zweig dans la pièce écrite par Elisabeth Bouchaud. Costumes raffinés d’Olga Papp, bijoux et coiffures élégantes, souliers fins et fourrures, indiennes et piano, cadre doré du miroir et velours rouge de la méridienne : on est dans un de ces lieux au charme suranné d’une bourgeoisie atemporelle, qui semble à l’abri des fracas du monde, puisqu’elle vit dans le cocon luxueux de l’art. Mais les passions travaillent à faire vaciller cet élégant équilibre. Deux femmes se rencontrent dans la coulisse d’un récital de province et décident de préparer ensemble un concours de chant. Laquelle des deux sera Violetta, « sempre libera » ? Pour rester libre, encore faut-il l’être déjà, ou avoir entrepris de se défaire des rets de la domination masculine. Dans la France de l’entre-deux-guerres, qui sert de cadre à la pièce, rares sont celles qui peuvent se permettre une telle insolence, sauf, peut-être Rose Berg, à laquelle Marguerite de Vence aimerait ressembler.

La cage aux rossignols

La directrice de La Reine Blanche interprète Rose, et Clara Schmidt est Marguerite. La première a l’assurance de la réputation et du talent. La seconde est une jeune première, dont l’ambition se cache sous la candeur de la débutante. Elle ressemble à l’Eve de Mankiewicz, le cynisme calculateur en moins. Elle a la voix, la présence et le talent ; elle n’a pas encore la certitude de pouvoir en disposer à sa guise. Rose semble plus sûre d’elle : elle a su se passer des hommes et a refusé de vivre par procuration, dans la pénombre du faire-valoir marital. C’est ce que Marguerite apprend d’elle ; mais, en excellente élève, elle découvre l’égoïsme en devenant maîtresse d’elle-même. Elisabeth Bouchaud a écrit une pièce de facture classique, dont les scènes se succèdent entre les intermèdes lyriques interprétés avec talent par Clara Schmidt. L’ensemble compose un spectacle plaisant, qui offre une parenthèse romanesque peu courante sur la scène actuelle. Deux actrices palpitantes et sincères, une histoire qui fait appel à l’émotion sans oublier de rendre hommage aux femmes qui choisissent de devenir autre que ce à quoi la société les destine : Nathalie Martinez, Elisabeth Bouchaud et Clara Schmidt offrent un joli huis clos au deuxième sexe.

 Catherine Robert

A propos de l'événement


A contre-voix
du dimanche 3 janvier 2016 au dimanche 20 mars 2016
La Reine Blanche
2bis Passage Ruelle, 75018 Paris, France

Mercredi et vendredi à 21h ; dimanche à 17h. Relâches 29 janvier et 12 février. Tél. : 01 40 05 06 96. Durée : 1h20.


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