La Terrasse

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Théâtre - Entretien

Urfaust

Urfaust - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Tempête
Gilles Bouillon Crédit : François Berthon

Théâtre de la Tempête / de Goethe / mes Gilles Bouillon

Publié le 28 décembre 2016 - N° 250

Du Faust de Goethe, nous connaissons surtout le texte de 1808. Or deux autres pièces l’entourent : Urfaust, écrit en 1775, et le posthume Faust 2 publié en 1833. Enthousiasmé par la traduction de Jean Lacoste et Jacques Le Rider (Bartillat, 2009), Gilles Bouillon met en scène la première.

Lorsque paraît sa traduction de Urfaust, Jean Lacoste qualifie ce texte de Goethe de « miracle ». Est-ce un terme que vous reprendriez à votre compte ?

Gilles Bouillon : Tout à fait, et cela d’abord du fait des circonstances de découverte de l’oeuvre, qui n’a été retrouvée que 30 ans après la mort de Goethe, en 1887. Lorsque celui-ci s’installe à Weimar en 1775 pour intégrer la cour du duc Charles Auguste, il confie le manuscrit d’Urfaust à Luise von Göchhausen, une jeune femme de la cour de la duchesse Anna Amalia, qui le recopie. C’est cette version qui est finalement retrouvée, après avoir été transmise de succession en succession. L’événement eût été mineur si le texte n’avait été qu’une esquisse du Faust que l’on connaît ; or il s’agit bien d’une œuvre à part entière.

En quoi cette pièce de jeunesse vous semble-t-elle plus proche des sensibilités contemporaines que celle de 1808 ?

G.B : L’écriture et la structure de Urfaust sont beaucoup plus hétérogènes et fragmentaires que celles des deux Faust ultérieurs. Son inachèvement même lui donne une force et une modernité qui m’ont beaucoup touché, et qui offrent une grande liberté de mise en scène. On retrouve bien sûr le désir de puissance et de connaissance du personnage éponyme, en qui je vois une sorte d’homme pré-nietzschéen très en phase avec notre époque.

« Une sorte d’homme pré-nietzschéen très en phase avec notre époque. »

Urfaust puise pourtant davantage dans les traditions du théâtre de foire que les deux autres Faust de Goethe.

G.B : Peut-être, mais il est aussi imprégné de motifs shakespeariens, qui en tant qu’inconditionnel de Shakespeare m’intéressent beaucoup. Grand apport de Goethe par rapport à la légende populaire, la tragédie de Marguerite, détruite par son amour pour Faust, est par exemple beaucoup plus développée dans Urfaust qu’ailleurs, ce qui donne à la pièce une dimension plus réaliste. Mephisto, avec qui Faust fait un pacte après avoir dilapidé toutes ses richesses, n’est d’ailleurs pas encore le diable mais un simple alter ego du héros.

La pièce est composée de 19 séquences. Comment avez-vous relevé le défi de cette fragmentation ?

G.B  : Faust, une légende allemande (1926) de Murnau et le film d’Alexandre Sokourov sorti en 2011 ont nourri ma mise en scène et la scénographie conçue par Nathalie Holt, avec qui je travaille depuis de nombreuses années. Mais je n’ai pas voulu confier à la vidéo la place la plus importante dans les changements de tableaux qui rythment le spectacle. J’ai opté pour des signes simples suggérant le passage d’un lieu à l’autre, afin de garder la simplicité chère à Goethe.

Propos recueillis par Anaïs Heluin

 

A propos de l'événement

Urfaust
du mercredi 11 janvier 2017 au mardi 7 février 2017
Théâtre de la Tempête
Route du Champ de Manoeuvre, 75012 Paris, France

Du mardi au samedi à 20h30, le dimanche à 16h30. Tel  : 01 43 28 36 36.

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