La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Savoir où l’on va

Savoir où l’on va - Critique sortie Théâtre Amiens Comédie de Picardie
Ahmed Madani CR : François-Louis Athénas

Comédie de Picardie / Ahmed Madani

Publié le 19 décembre 2013 - N° 216

Après le succès amplement mérité d’Illuminations, Ahmed Madani crée cet hiver Je marche dans la nuit par un chemin mauvais, où un jeune homme part à la rencontre du passé de son grand-père, jeune appelé pendant la guerre d’Algérie.

Vous revenez à la guerre d’Algérie, côté français ?

Ahmed Madani  : Il y a vingt ans, un ami metteur en scène – Pierre Orma – m’a demandé de le rejoindre pour me raconter sa guerre d’Algérie, dans un récit proprement libératoire. C’était la première fois qu’il en parlait. J’ai rempli un carnet de notes. Mais pendant vingt ans, je n’en ai rien fait. Puis, lors d’une résidence à Argentan, j’ai rencontré d’autres anciens appelés et je leur ai demandé de me raconter cette guerre. Ils étaient très troublés. Pour la plupart, ils n’en avaient jamais parlé. Ils étaient émus qu’on leur prête enfin attention, surtout venant de quelqu’un d’origine algérienne.

Ce spectacle part donc à la recherche d’un passé enfoui…

A.M. : Comme dans Illuminations, la guerre d’Algérie agit comme un arrière-plan. Mais ce qui m’intéresse surtout, c’est d’étudier comment ce qui s’est passé est encore là, comment l’histoire de chacun interagit avec son présent et son devenir. On ne peut pas savoir où l’on va si on ne sait pas d’où l’on vient. C’est pourquoi dans cette pièce, un vieil homme se retrouve face à son petit-fils, jeune adulte d’une vingtaine d’années, décalé, perturbé et perturbateur, qui va l’amener à révéler une partie de son histoire, qu’il n’avait jamais pu confier.

Ce silence forcé sur l’Algérie, est-ce aussi celui de toute une nation ?

A.M. : Bien sûr. Aujourd’hui, les langues se délient. Beaucoup de chercheurs s’intéressent  au sujet. Mais ce silence a mortifié beaucoup de gens de cette génération. J’ai par exemple rencontré un ancien appelé qui avait écrit plus de mille lettres à sa fiancée sans jamais lui dire ce à quoi il était vraiment confronté. La question du racisme en France vis-à-vis des Algériens est intimement liée à la guerre d’Algérie.

Avec Illuminations, vous avez mis sur scène des jeunes des cités en montrant qui se trouvait vraiment derrière les masques médiatiques. A quoi attribuez-vous son succès ?

A.M. : Les jeunes des banlieues se retrouvent sur scène. Et pour un public comme celui d’Avignon, ce spectacle provoquait un effet de soulagement. On s’aperçoit qu’existe en fait une grande communauté nationale. J’ai travaillé au Brésil, à la Réunion, ou à Paris, et l’identité planétaire est déjà profondément là.

Propos recueillis par Eric Demey

A propos de l'événement

Je marche dans la nuit par un chemin mauvais
du mardi 28 janvier 2014 au vendredi 31 janvier 2014
Comédie de Picardie
62 Rue des Jacobins, 80000 Amiens.

Du 28 au 31 janvier à 20h30. Le 29 à 19h30.Tél : 03 22 22 20 28. Durée : 1h15. 
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