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Danse - Critique

Retour à Berratham

Retour à Berratham - Critique sortie Danse Paris Théâtre national de Chaillot
Crédit : Christophe Raynaud De Lage Légende : Que reste-t-il d’un amour après l’exil ? Réponse dans cette collaboration Mauvignier / Preljocaj.

Théâtre National de Chaillot / Théâtre de Saint Quentin en Yvelines / Théâtre André Malraux / Chorégraphie Angelin Preljocaj

Publié le 29 août 2015 - N° 235

De la tragédie épique contemporaine voulue par Angelin Preljocaj, restaient dans la Cour d’honneur du Palais des Papes les traces d’un drame humain.

Pour cette nouvelle pièce, Angelin Preljocaj a passé une commande d’écriture à l’auteur Laurent Mauvignier, qu’il avait déjà « mis en danse » dans Ce que j’appelle oubli en 2012. Et c’est aussi véritablement une histoire qui se raconte, entre récit et dialogue : une histoire qui se déroule à Berratham, ville-fiction par où la guerre a laissé ses montagnes de cendres, ses cohortes de fantômes, ses carcasses de ferrailles et ses corps aujourd’hui désœuvrés. Arrive un jeune homme, nourri par une obsession : retrouver Katja, celle qu’il a aimée avant de fuir. Le décor est posé, les protagonistes identifiés, leurs buts déterminés : restait au chorégraphe la lourde tâche de faire vivre les quatorze interprètes dans cette proposition entre danse et théâtre, entre mots et mouvements, dont chacun possède son propre poids. La parole y circule à trois voix, avec deux comédiens et une comédienne : mention spéciale à cette dernière, qui n’est autre qu’Emma Gustafsson, ancienne danseuse remarquable du Ballet Preljocaj, et qui signe son grand retour dans le rôle de la mère de Katja. Sa présence rééquilibre ce qui aurait pu être une partie de ping-pong verbal, en apportant la consistance d’une âme ardente et le corps d’une femme meurtrie au texte dit.

Une équation danse-texte à résoudre

Dans ce contexte, où résonne la pesanteur de l’histoire, le chorégraphe a choisi de ne pas abandonner les lignes et la précision de sa danse. En témoigne cette première avancée de danseuses, dont l’alignement ne forme qu’une silhouette, au contour bien découpé et sans faille. Au fur et à mesure que se déroule la tragédie, en forme de flash-backs où le passé détermine le présent, la danse se fait plus âpre. Elle suit le fil, mais sans coller au récit. Quelques très belles trouvailles, comme cette mariée en noir, dont le gonflant de la robe n’est en fait qu’une succession de vestes d’hommes, avec son lent déshabillage qui se termine par la tentative d’une farandole, font tout de suite image et sens au-delà du texte. De même que les scènes d’amour ou de violence, chorégraphiées au plus proche de la chair… C’est peut-être là que le spectacle rencontre ses limites : entre le texte retenu dans la froideur de son récit, et la danse contenue dans la virtuosité des corps, sans doute une équation aussi irréalisable que cet amour… L’amour de deux entités qui peinent à se trouver.

 

Nathalie Yokel

A propos de l'événement

Retour à Berratham
du mardi 29 septembre 2015 au mardi 12 avril 2016
Théâtre national de Chaillot
1 Place du Trocadéro et du 11 Novembre, 75016 Paris, France

Du 29 septembre au 23 octobre 2015, les mardis, mercredis, vendredis et samedis à 20h30 (sauf le 10 octobre à 17h), les jeudis à 19h30, les dimanches à 15h30. Tél. : 01 53 65 30 00.

Théâtre de Saint Quentin en Yvelines, place Georges Pompidou, 78054 Saint Quentin en Yvelines. Les 19 et 19 mars 2016 à 20h30. Tél. : 01 30 96 99 00.

Théâtre André Malraux, place des Arts, 92500 Rueil-Malmaison. Les 11 et 12 avril 2016 à 20h45. Tél. : 01 47 32 24 42.

Spectacle vu au Festival d’Avignon 2015.

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