La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Purgatoire à Ingoldstadt

Purgatoire à Ingoldstadt - Critique sortie Théâtre DIJON THEATRE DIJON BOURGOGNE
Crédit photo : Julien Piffaut Légende : « Olga (Roxanne Cleyet-Merle) et Roelle (Alexandre Pallu) dans Purgatoire à Ingoldstadt par Maëlle Poésy. »

Région / Théâtre Dijon Bourgogne / de Marieluise Fleisser / traduction Kevin Keiss / mes Maëlle Poésy

Publié le 18 décembre 2012 - N° 205

Avec une fulgurance dont l’urgence tient à la vie qu’on veut mordre, Maëlle Poésy lance sur la scène une jeunesse de feu et de grâce en mal d’espérance.

Purgatoire à Ingoldstadt (1924) est la première pièce de Marieluise Fleisser, écrite à 23 ans, l’âge approximatif des personnages du drame comme des comédiens que dirige la metteuse en scène Maëlle Poésy. Traduite par le dramaturge Kevin Keiss, Purgatoire… de celle qui fut la compagne de Brecht de 1924 à 1927, se développe dans une urgence ardente à l’image de l’égrènement des stations de la Passion du Christ. Ce Chemin de Croix est vécu par Roelle, l’anti-héros mélancolique incarné par Alexandre Pallu. Perçu comme différent par les autres, le jeune homme méditatif est à la recherche de sa vérité. La mise en croix symbolique de cet être solitaire n’en concerne pas moins la vibrante Olga (Roxanne Cleyet- Merle) dont il est l’amoureux éconduit ; la jeune femme attend un enfant, situation aliénante qui la prive d’avenir. Le père désemparé (Cédric Simon) fait porter à son épouse défunte la responsabilité de l’insubordination de sa fille aînée. Quant au jeune rebelle, sa mère entrave l’accomplissement de ses désirs adolescents. Il est l’intrus de ce petit monde bavarois sur lequel pèse l’héritage familial, religieux et moral. Victime d’humiliations, il se sait dépourvu de force intérieure, bouc-émissaire d’une génération sacrifiée qui fait jouer contre lui un esprit de vengeance inassouvie.

La loi du désir – attirance ou rejet – décline ses effets pervers

Ces jeunes gens, sous l’impulsion de la musique classique comme du rock, composent une bande joyeuse, à la fois vive et colorée, quotidienne et poétique. Rires et pas de danse furtifs, désirs et regards expressifs, les comédiens affirment leur singularité qui touche à l’universalité du présent. Une jeune fille libre, Hermine (Caroline Arrouas), ironique et cruelle, tient aussi le rôle de la mère malhabile du garçon isolé. Clémentine (Nathalie Bourg), la sœur d’Olga, interprète sa déception d’amoureuse écartée. Ces relations existentielles inaugurales apparaissent dans leur évidence immédiate, brute et violente. La loi du désir – attirance ou rejet – décline ses effets pervers, liés aux rapports immatures de pouvoir – élévation du plus fort et élimination du plus faible. La maison artisanale inachevée, élevée sur pilotis de bois, tel un observatoire d’oiseaux, impose l’image métaphorique d’un printemps de la vie blessé, en 1930 comme en 2013.  Entre les ailes blanches du désir, les confettis de kermesse, la soif de vivre et la volonté d’en finir, exulte la fresque lumineuse d’une jeunesse à sauver contre les temps incertains d’hier comme d’aujourd’hui.

Véronique Hotte

A propos de l'événement

Purgatoire à Ingoldstadt
du mercredi 9 janvier 2013 au vendredi 11 janvier 2013
THEATRE DIJON BOURGOGNE
Centre dramatique national, Salle Jacques Fornier, 21000 Dijon

Du 9 au 11 janvier 2013. Tél : 03 80 30 12 12.
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