La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Peer Gynt

Peer Gynt - Critique sortie Théâtre Sceaux Les Gémeaux
Bobee - Peer Gynt - ©Arnaud Bertereau.jpg

Les Gémeaux / Texte de Henrik Ibsen/ mes David Bobée

Publié le 20 décembre 2017 - N° 261

Avec Peer Gynt, pièce aussi fantaisiste qu’exigeante, le directeur du Centre dramatique national de Normandie et metteur en scène David Bobée continue le travail engagé avec Hamlet ou Lucrèce Borgia : interroger les grandes figures du répertoire.

Vous dites : « Monter Peer Gynt à présent, c’est parler d’aujourd’hui, c’est interroger un monde bouleversé. C’est se lever contre une réalité brutale, sombre, silencieuse, convenue. » Que voulez-vous exprimer ?

David Bobée : Je regarde la pièce comme une critique puissante, sévère, de la société norvégienne telle qu’Ibsen la vivait ; une société raciste, repliée sur elle-même, égoïste, à laquelle peu de gens offraient une résistance. Peer Gynt est en ce sens un personnage emblématique. Figure symbolique de cet individualisme, de cette fuite en avant, de cette lâcheté, Peer Gynt, dont on suit le parcours de l’adolescence à la vieillesse, va chercher à s’enfuir aux quatre coins du monde en voulant s’affranchir de toutes contraintes, à la recherche de ce soi qui reste à inventer… Il est en quête d’un rêve de hauteur, de reconnaissance, de grandeur. Un rêve qui est celui de quelqu’un qui accepte le monde tel qu’il est. Hâbleur, vaurien, menteur, égoïste, infidèle, Peer Gynt n’est ni un héros ni un anti-héros. Il pose la question essentielle : qu’est-ce qu’être au monde ? Qu’est-ce qu’être soi ? Mais sa quête éperdue de vrai-faux naïf à la façon de Candide n’a rien d’un parcours initiatique. Et c’est ce que je trouve fascinant ; avec Peer Gynt nous n’apprenons rien. Aucune morale à la fin. La question reste ouverte et nous met face à nous-mêmes.

« Peer Gynt pose la question essentielle : qu’est-ce qu’être au monde ? »

Quels sont vos grands axes dramaturgiques ?

D.-B : La pièce a souvent été montée de manière folklorique. Je la lis d’abord comme une pièce éminemment politique. Mais son caractère épique appelle une levée de l’imaginaire. Les enjeux dramaturgiques sont très excitants. Parlons par exemple de la rencontre avec les Trolls. Comment relever le défi de cette intervention du « merveilleux » ? J’y vois une métaphore très parlante au regard des propos que tiennent ces créatures issues de la mythologie norvégienne, tels que « il faut adopter nos valeurs », etc. Les Trolls incarnent à mes yeux un petit groupe porteur de pensées fascistes. C’est ainsi qu’ils seront mis en scène. Quant à la scénographie, nous avons pensé à un terrain vague d’où émergent les restes d’une fête foraine, échafaudages modulables manipulés à vue par les acteurs.

 Qu’avez-vous particulièrement demandé aux acteurs ?

D.-B : Le collectif d’acteurs rassemblés est à l’image du théâtre physique, transdisciplinaire, transculturel, fort en accents divers et variés, que j’aime. Le spectateur doit tomber sous le charme de Peer Gynt. Et je suis tombé sous celui de Destinée Mbikulu, jeune homme issu du Conservatoire de Rouen, qui incarne le personnage éponyme. Catherine Dewitt, avec qui j’adore travailler, joue le rôle d’Aaze, la mère de Peer Gynt. On retrouve aussi dans cette distribution Jérôme Bidaux, Thierry Mettetal et aussi toute ma bande de comédiens acrobates danseurs qui prennent en charge la myriade de petits rôles.

Propos recueillis par Marie-Emmanuelle Galfré

A propos de l'événement

Peer Gynt
du jeudi 25 janvier 2018 au dimanche 4 février 2018
Les Gémeaux
49 Avenue Georges Clemenceau, 92330 Sceaux, France

Tél : 01 46 61 36 67. www.lesgemeaux.com

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