Oboman

On a tous en nous quelque chose de Cole Porter, ce désir fou de prolonger la nuit. La référence est fausse car c’est de Tennessee Williams qu’il est question dans la chanson signée Michel Berger. Pourtant, l’expression fonctionne aussi parfaitement avec l’auteur de « Love for Sale », « I’ll Get a Kick Out of You » ou « My Heart Belongs to Daddy ». Pour la célébration du cinquantenaire de sa disparition (le 15 octobre 1964), Cole Porter n’a pas fait la une des magazines et les hommages se sont faits discrets voire rares. Seul le hautboïste Jean-Luc Fillon s’est donné cette peine. Baptisé « Begin The Night » (Soupir Edition/Abeille Musique), son disque propose une relecture à la fois minimaliste et mélancolique de grands « tubes » du compositeur américain. En trio avec le violon alto de Fred Eymard et le piano de João Paulo, « Oboman » appose un aplat de couleurs inédit à ces mélodies. Comme aime le rappeler Jean-Luc Fillon, le hautbois est un oiseau rare dans le monde du jazz et des musiques improvisées. Quand on a en tête les chansons de Porter avec une trompette (Miles Davis), un saxophone (Sonny Rollins) ou une voix (Billie Holiday), elles révèlent de nouvelles nuances avec cet instrument bien moins « classique » qu’on veut bien le croire. Elles risquent même de sonner encore (plus) différemment lors de la soirée de sortie du disque au New Morning (le 2 décembre) puisqu’Oboman aura comme invité spécial le grand guitariste manouche Christian Escoudé. Le mélange s’annonce prometteur.

M. Durand