La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Molly S.

Molly S. - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre Trévise
La metteure en scène et comédienne Julie Brochen. Crédit : DR

Théâtre Trévise / d’après Brian Friel / adaptation et mes Julie Brochen

Publié le 22 novembre 2016 - N° 249

Julie Brochen porte à la scène une version revisitée de Molly Sweeney, du dramaturge irlandais Brian Friel. Au côté des chanteurs-comédiens Olivier Dumait et Ronan Nédélec, ainsi que du pianiste Nikola Takov, l’ancienne directrice du Théâtre national de Strasbourg interprète cette pièce qui creuse la question du handicap, de l’isolement et du rapport au monde.  

Pouvez-vous revenir sur l’événement personnel qui est à l’origine de votre projet de mettre en scène Molly S. ?

Julie Brochen : L’idée de ce projet est née après une période d’un mois, en 2013, durant laquelle j’ai subitement perdu l’usage de mon oreille gauche. Au cours de cette période, j’ai pris des notes sur ce qui m’arrivait, sur la perte de certaines sensations, certaines perceptions du monde, sur le déséquilibre interne qui me touchait, ainsi que sur la notion plus générale de perte de sens. Je me suis reposé des questions essentielles telles que pourquoi je faisais les choses, qui j’étais, qu’est-ce qui me fondait… Parallèlement à cela, je me suis intéressée aux travaux du neurologue britannique Oliver Sacks, tout en revenant à la pièce de Brian Friel que Frédéric Franck (ndlr, ancien directeur du Théâtre de l’Œuvre) m’avait fait découvrir quelques années auparavant en me proposant de la mettre en scène.

Qu’est-ce qui vous a poussée à incarner vous-même le rôle de Molly Sweeney, femme qui, après être devenue aveugle à l’âge de dix mois, se laisse convaincre par son mari de rencontrer un ophtalmologue pour tenter de recouvrer la vue ?

J. B. : Les notes compulsives que j’ai écrites durant cette période de semi-surdité m’ont fait comprendre que j’avais besoin, non pas simplement d’appréhender cette pièce avec mon intellect, mais d’incarner complètement ma pensée, de me repositionner, de monter sur le plateau pour investir physiquement le personnage de Molly.

« J’avais besoin, non pas simplement d’appréhender cette pièce avec mon intellect, mais (…) de monter sur le plateau pour investir physiquement le personnage de Molly. »

J’ai ensuite fait parvenir le texte à Ronan Nédélec et Olivier Dumait, deux chanteurs qui faisaient partie de la distribution de La Petite Renarde rusée, opéra de Leoš Janáček que j’ai mis en scène en 2002. Nous avions, depuis cette collaboration, très envie de retravailler ensemble.

 Qu’est-ce qui se détache pour vous derrière la pièce de Brian Friel ?

J. B. : Une façon différente de se positionner par rapport au monde. Cette différence constitue une richesse, une force. Molly choisit, par amour pour son mari, de se faire opérer afin de tenter de retrouver la vue. C’est un personnage qui me touche beaucoup. Elle est dans l’acceptation de l’autre, dans l’ouverture, dans l’expérimentation d’un autre champ des possibles – un champ qui, à la fin de la pièce, va se restreindre de manière terrible…    

Pourquoi avoir choisi d’associer de la musique et du chant à cette histoire ?

J. B. : L’idée de départ était que Ronan et Olivier proposent des choses qu’ils avaient envie de chanter de façon nécessaire et vitale. Il fallait que leur envie soit aussi forte que mon envie de donner voix à Molly. D’une certaine manière, faire intervenir la musique, c’est rendre la vision à ce personnage. On peut réussir à voir tant de choses à travers la musique : des paysages, des couleurs…      

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

 

A propos de l'événement

Molly S.
du mercredi 7 décembre 2016 au samedi 31 décembre 2016
Théâtre Trévise
14 Rue de Trévise, 75009 Paris, France

Du mercredi au samedi à 21h30. Relâche exceptionnelle le 24 décembre. Tél. : 01 48 65 97 90. www.theatre-trevise.com

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